L’accord UBS sera soumis au parlement, a décidé mercredi le Conseil fédéral. Le fisc américain est resté intraitable. Il n’entend pas revenir sur le texte signé en août dernier avec Washington, par lequel la Suisse s’est engagée à identifier 4450 contribuables américains titulaires de comptes UBS, soupçonnés de délits fiscaux par leur pays d’origine. Pour le Conseil fédéral, l’aval du parlement suffit, l’accord n’a pas à être soumis en plus au référendum facultatif. Les Chambres pourront toutefois en décider autrement.

Les émissaires suisses n’ont pas obtenu les assouplissements espérés. Le message des autorités américaines a été très clair, explique Folco Galli, porte-parole de l’Office fédéral de la justice: les engagements pris doivent être tenus.

Or, en jugeant le mois dernier que l’accord étendait la transmission de données bancaires à des cas de simple soustraction fiscale dans une mesure incompatible avec l’ancienne convention de double imposition, toujours en vigueur, le Tribunal administratif fédéral a rendu impossible le respect du texte signé en août. A s’en tenir à cette jurisprudence, la Suisse n’aurait été en état de livrer qu’environ 250 comptes sur les 4450 prévus, soit 5%.

Le Conseil fédéral n’a vu d’autre solution que de soumettre l’accord au parlement. Un protocole sera d’abord signé avec les Etats-Unis en mars pour préciser que l’accord prime sur les dispositions de la convention de double imposition de 1996, et répondre à l’objection soulevée par le Tribunal administratif fédéral. L’accord devrait ensuite être formellement transmis au parlement fin avril, de manière à ce que les Chambres puissent en traiter en juin.

Le président du PDC, Christophe Darbellay, s’est montré favorable à une ratification par le parlement. Le PS a posé comme condition que les bonus des dirigeants de la banque soient drastiquement limités, et que des solutions soient trouvées aux problèmes posés par une banque trop grande pour disparaître. L’UDC s’est en revanche déclarée opposée, tandis que le président des libéraux-radicaux, jusqu’ici opposé lui aussi, a refusé de prendre position.

Le temps est compté, la Suisse devant rendre une décision sur les 4450 comptes jusqu’en août prochain. Faisant usage d’une faculté que la loi lui réserve, le Conseil fédéral veut accélérer au maximum la manœuvre en appliquant provisoirement l’accord dès la signature du protocole. Aucune information ne sera cependant transmise aux Etats-Unis avant le feu vert du parlement.

Si les Chambres n’achèvent pas leur examen en juin, ou si elles décident de soumettre l’accord au référendum, les termes de celui-ci pourront néanmoins être formellement respectés, explique Folco Galli. La Suisse s’est en effet engagée non pas à livrer 4450 comptes, mais à rendre 4450 décisions dans le délai d’un an, non compté un éventuel recours en justice. L’application provisoire de l’accord permettrait donc aux services de Hans-Rudolf Merz de se prononcer sur la totalité des comptes visés dans les délais.

Les Etats-Unis se sont toutefois réservé la possibilité de prendre des «mesures proportionnées» dans le cas où, en août 2010, le nombre de comptes effectivement reçus diffère «considérablement de ce qui peut être raisonnablement escompté». Et s’ils n’ont rien reçu ou presque, ils pourraient alors réactiver la procédure du «John Doe Summons» contre UBS, que les Suisses avaient cherché par tous les moyens à éviter en signant l’accord de 2009.

Le Conseil fédéral ne dispose toujours pas d’informations précises sur le programme de dénonciations volontaires mis en place par le fisc américain. Plus de 14 000 comptes ont été annoncés, et il reste environ un tiers des informations à dépouiller. Si 10 000 d’entre eux étaient des comptes UBS, le «John Doe Summons», actuellement suspendu, serait retiré avec effet immédiat. Selon plusieurs sources non officielles, la barre de 10 000 comptes UBS serait toutefois très loin d’être atteinte, les projections avoisinant les 3500. L’essentiel n’est toutefois pas là, précise Folco Galli, la Suisse restant tenue d’identifier 4450 comptes quels que soient les résultats du programme.

Le Conseil fédéral a également précisé mercredi qu’il ne facturerait à UBS qu’un million de francs pour les frais liés à la négociation de l’accord, sur la quarantaine de millions environ que l’ensemble du dossier lié aux fraudes d’UBS aux Etats-Unis a coûté à la Confédération, toutes procédures confondues. Une décision que les partis ont dans l’ensemble vertement critiquée. Il n’y a pas de bases légales pour facturer davantage, a indiqué le gouvernement, et des versements volontaires d’UBS ne peuvent être acceptés, sous peine que les décisions de l’administration paraissent ne pas avoir été prises en toute indépendance.