Les jeunes femmes interviewées par 20 Minuten n’ont pas porté plainte. Mais dans un communiqué publié jeudi, la police zurichoise a elle-même fait le lien avec les agressions survenues en Allemagne. Sans parler de migrants, son texte évoque des «hommes à la peau sombre» et appelle d’autres victimes éventuelles ainsi que des témoins à se manifester. Quelque 120 000 personnes, selon les organisateurs, se trouvaient ce soir-là sur les bords de la Limmat.
C’est dans le cadre de leur déposition, alors qu’elles dénonçaient un vol survenu ce soir-là, qu’une demi-douzaine de femmes ont évoqué des attouchements par des groupes d’hommes. Les premières plaintes ont été déposées dès la nuit du 31 décembre au 1er janvier, la dernière en date dans la journée de jeudi. D’autres ne sont pas à exclure.
Les autorités font pour l’heure état de «deux douzaines de vols» en ville le 31 décembre, un chiffre semblable, sinon inférieur, à ceux de 2014. La police, souligne sa porte-parole Judith Hödl, travaille à recouper les informations sur les agressions et la manière dont elles se sont déroulées. «Il est par exemple possible qu’il y ait eu des contacts lorsque le sac d’une femme a été fouillé.» Manoeuvre de diversion ou agression sexuelle avérée, la question reste en suspens pour la police, qui n’exclut pas de prendre contact avec ses homologues en Allemagne. Pour l’heure, aucune arrestation n’a été effectuée.
Lorsqu’elle a pris connaissance de ce qui s’était passé en Allemagne, Elham Manea, professeure à l’Institut de Sciences politiques de Zurich, a «tout de suite» pensé à la place Tahrir, cette place du Caire où une centaine d’agressions sexuelles avaient été commises lors des manifestations contre le président Mohamed Morsi, en juillet 2013. Bi-nationale suisse et yéménite, elle a «espéré très fort qu’il ne s’agirait pas de migrants» mais n’a pas été surprise des suites de l’enquête. «Ce que je lis des événements de Zurich semble correspondre au même schéma, celui d’hommes qui encerclent des femmes pour les agresser.»
Sur Facebook, Elham Manea a partagé des articles appelant les féministes à ne pas garder le silence sur les événements survenus le 31 décembre. «Nous avons tous peur de la stigmatisation, déclare-t-elle, nous craignons tous de nous en prendre à des réfugiés qui ont fui une situation désespérée. L’empathie doit primer mais nous ne pouvons pas non plus ignorer que certains de ces hommes arrivent avec des frustrations sexuelles et, surtout, des valeurs et des normes qui voient les femmes de manière sexuelle, tout particulièrement les Occidentales qui auraient des mœurs légères. Même si de nombreuses femmes agressées à Tahrir portaient le voile.»
Comme d’autres, Elham Manea appelle à renforcer les mesures d’information et d’éducation «sur ces valeurs qui sont pour nous intrinsèques. En tout cas, ignorer ce qui se passe n’est pas la solution et ne fera en rien disparaître le problème.» La conseillère nationale Silvia Schenker (PS/BS), vice-présidente du Parti socialiste, a ainsi salué dans 20 Minuten l’idée de cours, comme ils sont donnés en Norvège ou au Danemark, pour informer les requérants sur les comportements à avoir avec les femmes. Des mesures existent déjà. Ainsi, dans les centres de premier accueil des Grisons, les requérants sont informés du fait que toute relation sexuelle avec des personnes mineures sont punissables.