En une décennie, le vent a tourné. Le scénario de la fusion des cantons de Vaud et de Genève, à la fin des années 90, avait été porté par des visionnaires inspirés par la crise des finances publiques. Mais le peuple s’y est opposé sèchement dans les urnes. Après une période de vide, la machine de la collaboration a été remise en route d’un bout à l’autre du Léman, discrètement. Dans le domaine de la santé, de la formation, de la culture et même du sport. Or, l’essor phénoménal des agglomérations qui se moquent des frontières cantonales et nationales a accéléré le processus. En quelques années, la mobilité est devenue l’enjeu majeur de l’avenir de l’Arc lémanique. La métropole à deux têtes risque la paralysie si elle ne prend pas son destin en main. Sur le rail notamment.
La collaboration scellée jeudi à Prangins fait fi du volontarisme politique. Ce pacte incarne le triomphe de la nécessité économique et socio-démographique. Outre sa portée pratique, l’accord a valeur de symbole. En matière de transports, la région lémanique doit faire face aux priorités de la Confédération et des CFF ainsi qu’à l’hégémonie zurichoise, qui ont tendance à la marginaliser. Malgré les disputes, les malentendus, voire l’indifférence, les deux cantons lancent un message au reste du pays. Et à leurs populations dont ils ont su comprendre les besoins. Besoins qui réclament une action supracantonale. Que cet accord survienne au moment de la crise économique tient de la coïncidence, mais permet heureusement aux deux gouvernements de manifester un sens politique commun qu’on attendait depuis longtemps.