Suisse-UE
L’Union européenne aurait de sérieuses réserves par rapport à la solution de mise en œuvre de l’initiative «Contre l’immigration de masse». Une telle fuite, dans le contexte actuel, ne surprend pas

La fuite du côté de Bruxelles d’un document secret de quatre pages contenant des réserves sur le projet de mise en œuvre de l’initiative contre «l’immigration de masse» arrive à point nommé pour l’Union européenne. La loi d’application du 9 février est en cours de traitement aux Chambres fédérales. Elle effectue sa première navette entre le Conseil national et le Conseil des Etats. Des représentants de la chambre des cantons ont déjà fait part de leur intention de durcir le projet, notamment la préférence indigène light, qui consisterait à obliger les employeurs à annoncer les postes vacants dans certaines circonstances.
«Pas grave de la part d’experts»
C’est dans ce contexte qu’interviennent les réserves émises par «des juristes européens» comme l’indique la SRF sans davantage de précisions. «L’UE est en train de hausser le ton, parce qu’elle se rend compte que la Suisse va arriver seule à une solution unilatérale avec la libre circulation des personnes. Je m’attends encore à quelques vagues ces prochaines semaines. Ce n’est pas grave tant que cela vient d’experts et pas de responsables politiques. C’est leur travail de faire pression», réagit un haut responsable helvétique.
De fait, la tension est forte à Bruxelles. Selon le document diffusé mercredi, la préférence indigène light irait déjà trop loin et ne respecterait pas l’Accord sur la libre circulation des personnes (ALCP). Le projet mis sous toit par le National prévoit aussi la possibilité pour la Suisse de prendre des mesures correctives en cas de problèmes sociaux et économiques persistants et de les soumettre au Comité mixte qui réunit des représentants helvétiques et européens. Le Conseil national était ainsi persuadé de l’eurocompatibilité de son projet. Cette possibilité reprend en somme des dispositions déjà prévues par l’ALCP (article 14, al.2).
Contexte diplomatique particulier
Mais ce point aussi est très critiqué par les fameux juristes européens. Ils estiment que le Comité mixte n’a pas pour compétence de décider de mesures qui risqueraient d’enfreindre la libre circulation. Cette remarque renvoie à la nécessité aux yeux de Bruxelles de renouveler la voie bilatérale, d’arriver à un nouvel accord institutionnel avec la Suisse, qui définisse une autorité d’arbitrage et d’interprétation du droit.
Jugée indispensable à la conclusion de nouveaux accords bilatéraux (électricité, finances, etc.), la question institutionnelle sera sans doute au cœur du prochain rapport sur l’état des relations entre la Suisse et l’UE attendu en décembre. Les ambassadeurs des 28 Etats membres de l’UE se réunissent dès ce soir pour entamer leurs travaux. Là encore, le calendrier de la fuite ne doit rien au hasard.