5,9% en 2010, 1,2% en 2011 et 5,6% en décembre 2012: les hausses des tarifs de train et de bus se succèdent et ce n’est pas terminé. Directeur de l’Union des transports publics (UTP), Ueli Stückelberger pronostique une hausse globale de 20% entre 2012 et 2018. Si l’on ajoute les adaptations de ces deux dernières années, le renchérissement pourrait s’élever à 27% en moins de dix ans!

L’UTP, qui regroupe toutes les entreprises de transports du pays et dont les CFF sont le principal pilier, a annoncé vendredi un renchérissement moyen de 5,6% pour décembre prochain. C’est la conséquence de la décision du Conseil fédéral de reporter sur les compagnies de bus et de train une partie de la facture de l’entretien et du développement du réseau ferroviaire. Il a pris cette décision par voie d’ordonnance, sans attendre que le parlement se prononce sur la structure et le financement du futur fonds d’infrastructure ferroviaire (FIF), qui verra le jour dans quelques années.

Le report de charges sur les entreprises est prévu en deux étapes: une première tranche de 200 millions en 2012, une seconde de 100 millions en 2016. Si l’UTP répercutait la totalité de la facture sur les usagers, l’augmentation des tarifs atteindrait 9%. Les entreprises de transport ont cependant décidé d’assumer elles-mêmes une partie de la charge. Ainsi, l’adaptation tarifaire prévue pour décembre prochain ne sera «que» de 5,6% en moyenne.

La majoration variera selon les titres de transport. Une fois encore, c’est l’abonnement général qui verra son prix grimper le plus fortement. L’AG de deuxième classe, qui coûtait 3100 francs en 2010, sera vendu au prix de 3560 francs à la fin de l’année. Quant aux titulaires d’un AG de première classe, ils devront débourser 5800 francs alors que le prix était encore de 4850 francs avant décembre 2010. Cela représente une hausse de près de 1000 francs en trois ans, dont 450 francs (+8,4%) en 2012.

L’abonnement général senior coûtera 4500 francs au lieu de 4200 (+7,1%). Le demi-tarif, dont le prix était passé de 150 à 165 francs en 2010, renchérira de 10 francs supplémentaires (+6,1%). Les billets isolés seront facturés 4% plus cher en moyenne.

Ces différents relèvements de tarifs ne répondent pas aux mêmes besoins. En 2010 et en 2011, ils étaient destinées à rapporter de nouvelles recettes aux CFF et aux autres compagnies pour couvrir les coûts (personnel, sécurité, énergie, entretien) liés à l’extension de l’offre ainsi que l’achat de nouveau matériel roulant. Cette année, les recettes engrangées sont une contribution au financement des infrastructures.

De nouvelles adaptations sont possibles en 2013, 2014 et 2015 pour les besoins des entreprises de transport. «Rien n’est exclu mais rien n’est décidé», commente Patricia Claivaz, porte-parole des CFF, qui souligne que l’argent récolté ces dernières années profite aux utilisateurs. «Les CFF investissent un milliard par an. De nouvelles rames circuleront sur l’Arc lémanique dès cet été», précise-t-elle. En 2016, c’est en principe la Confédération qui reviendra à la charge pour le financement des infrastructures. D’ici là, toutefois, le parlement aura donné son avis sur le financement du FIF.

Les annonces de vendredi ont certes été saluées par l’Union suisse des arts et métiers (USAM), mais elles sont critiquées par la Fédération romande des consommateurs (FRC), qui regrette que les CFF et la Confédération «comptent sur l’usager pour payer la note» de leurs investissements respectifs dans le matériel roulant et l’infrastructure alors que ceux-ci profitent au «pays et à son économie tout entière».

Vice-président de l’Association transport et environnement (ATE), le socialiste Roger Nordmann est lui aussi critique. «La vague de hausses se confirme. C’est la stratégie voulue par Doris Leuthard. Je suis très sceptique. C’est grave d’augmenter les tarifs des transports publics de 27% alors que le coût d’utilisation du réseau routier n’augmente pas.» Il critique la décision du Conseil fédéral d’imposer la prochaine adaptation des tarifs par voie d’ordonnance en contournant le parlement. Mais il salue l’«esprit civique des entreprises de transport qui font un grand effort pour ne pas répercuter la totalité sur les usagers, ainsi que l’engagement du personnel». Pour Roger Nordmann, la seule réponse à la spirale de hausses tarifaires est l’initiative populaire de l’ATE, qui veut attribuer au rail la moitié des recettes des impôts sur les carburants. Cette initiative est combattue par la droite et les milieux routiers.

Les tarifs présentés vendredi devront encore être approuvés par le Surveillant des prix. Comme l’UTP renonce à répercuter la totalité de la facture sur les usagers, Roger Nordmann juge la marge de manœuvre de Monsieur Prix plutôt étroite.