Le 24 septembre, les Genevois éliront trois juges et trois suppléants à la Cour des comptes. Cette nouvelle institution, que les citoyens ont plébiscitée en novembre dernier, sera chargée du contrôle des administrations publiques. Au départ, les cinq partis gouvernementaux avaient décidé de présenter une liste commune de candidats. Mais les socialistes ont retourné leur veste au dernier moment (LT du 2.8.2006). Membre de la direction du PS, Albert Rodrik explique pourquoi le parti a lâché l'Entente bourgeoise pour former une liste avec SolidaritéS, formation à gauche du PS.

Le Temps: A-t-il été difficile de convaincre le comité directeur du PS de s'unir aux autres partis gouvernementaux pour constituer une liste commune de candidats à la Cour des comptes?

Albert Rodrik: Au départ, le comité directeur du Parti socialiste trouvait cette idée un peu curieuse. Mais ce principe a finalement été accepté. A partir de ce moment, les négociations avec l'Entente bourgeoise se sont très bien déroulées. Ensemble, nous avons dégagé le profil idéal des juges titulaires de la Cour des comptes: nous souhaitions trouver deux experts financiers et un pilote juridique.

- Alors pourquoi les socialistes se sont-ils défilés au dernier moment?

- Dès le départ, nous avons affirmé que le candidat proposé par le PDC nous posait problème. Mais nous avons continué à négocier, car les autres candidats à disposition nous convenaient. Et d'autre part, à ce moment-là, nous n'avions pas de candidat alternatif à présenter. Jusqu'au 21 juillet, nous avons répété que la candidature PDC n'était, à nos yeux, pas adéquate. On ne nous a jamais écoutés. J'imagine que nos partenaires ne nous croyaient pas capables de sortir du jeu en créant une liste de l'Alternative de gauche.

- Certains élus, de droite et de gauche, estiment que cette volte-face est due à la faiblesse de vos instances dirigeantes, qui n'ont pas su imposer cette liste...

- La direction du Parti socialiste est en reconstruction depuis son congrès de mars 2006. Nous avons essayé de tirer les leçons d'une année électorale décevante. Mais l'attitude du PS dans cette affaire de la Cour des comptes n'a rien à voir avec la soi-disant faiblesse de la direction du parti! De toute façon, le vrai test de l'état du PS se déroulera en 2007, lors des élections municipales et fédérales.

- Vous présentez désormais une liste en collaboration avec SolidaritéS. Cette formation, qui se situe à la gauche du PS, vous a-t-elle influencé?

- Pas du tout. Je n'ai jamais été sensible aux «sirènes de l'extrême gauche» au sens où la droite nous le sert à chaque instant.

- Quelle est la part de responsabilité des socialistes dans l'échec de l'élaboration d'une liste commune aux cinq partis?

- Le PS est coresponsable de cet échec. Car au départ, nous n'avions pas de candidat à proposer. Mais je déplore également la surdité du PDC. J'espère qu'une nouvelle occasion d'aboutir à un accord entre partis se présentera. A Genève, nous n'avons pas de culture de la concertation. Pourtant, nous ne devrions pas avoir peur d'échanger nos idées, de tenter des compromis.