Olivier Jornot: Cette partie du projet découle de la décision prise par le Tribunal administratif sur le cas Rhino. Par son arrêt, il laisse entendre que l'écoulement du temps a eu en quelque sorte un effet guérisseur sur le trouble à l'ordre public. Or, d'un point de vue politique, et sans vouloir critiquer le travail du Tribunal administratif, nous estimons que le trouble à l'ordre public perdure aussi longtemps qu'un immeuble est illicitement occupé.
Par ce texte, vous dites vouloir revenir à la pratique de Bernard Bertossa en matière de squat. C'est assez paradoxal de vous voir défendre une pratique très permissive.
Il est faux de croire que Bernard Bertossa était très permissif avec les squatters. Cette pratique, qui remonte en réalité au début des années 80, est tout simplement réaliste. Elle consiste à dire qu'un immeuble habité par des locataires vaut mieux qu'un immeuble squatté, mais qu'un immeuble squatté vaut mieux qu'un immeuble vide. Il est vrai qu'il y a vingt ans, les libéraux n'étaient pas forcément convaincus par cette manière d'aborder les choses. Mais aujourd'hui, il faut reconnaître que si les squatters jouent le jeu, cette pratique permet de gérer la question des squats de manière paisible. C'est donc un moindre mal.
Votre texte donne davantage de marge de manœuvre au procureur général en lui permettant de «requérir directement la force publique». Etant donné que c'est Daniel Zappelli qui est en poste, n'est-ce pas une manière de signer l'arrêt de mort des squats à Genève?
Au contraire. Ce qui nous effraie, c'est de voir qu'au terme de la période nécessaire à la délivrance des autorisations de construire, l'évacuation n'est pas possible. Cela signifie qu'à l'avenir il faudrait automatiquement faire évacuer les squats au moment où ils se constituent, sans chercher à savoir si l'immeuble peut être loué immédiatement ou pas. Faire arrêter les squatters deviendrait le seul moyen dont disposerait le procureur général pour faire régner l'ordre public.
Notre projet de loi, en revanche, donne au procureur les moyens de libérer les immeubles au moment où les autorisations sont accordées. Ce qui permet à la pratique qui prévalait jusqu'à maintenant de perdurer.