Publicité

Radiographie annuelle de la détention en Suisse

Le nombre de personnes enfermées est resté stable au niveau national. Les cantons latins, notamment Vaud et Genève, se distinguent toujours par un taux de détenus plus élevé

La prison de Champ-Dollon, à Genève, toujours chroniquement surpeuplée. — © Valentin Flauraud / REUTERS
La prison de Champ-Dollon, à Genève, toujours chroniquement surpeuplée. — © Valentin Flauraud / REUTERS

A observer de loin cette sorte de photographie du monde carcéral suisse, prise le 31 janvier 2022, tout irait presque pour le mieux dans le meilleur des mondes. Les chiffres de l’Office fédéral de la statistique, publiés ce jour, dénombrent 6310 personnes détenues pour 7341 places disponibles, soit un taux d’occupation assez stable de 86%. Mais cela ne dit encore rien de la répartition et des problèmes de surpopulation qui perdurent dans certains cantons romands. Indicateur de la politique pénale, Vaud reste le champion de l’enfermement avant jugement, suivi de Zurich (pourtant deux fois plus peuplé) et Genève. Ces trois cantons totalisent à eux seuls 55% des détentions provisoires.

Globalement, la Suisse compte 6 personnes de moins dans ses prisons par rapport au même jour en 2021 (et 744 de moins par rapport à la référence noire de 2013). La majorité des détenus (66%) exécute une peine ou une mesure (y compris en exécution anticipée), 1872 personnes (30%) se trouvent en détention provisoire ou pour des motifs de sûreté (par exemple en attente d’un appel) et 272 personnes (4%) sont incarcérées pour d’autres raisons (dont 161 sous mesures de contrainte en vue d’un renvoi). Le nombre de femmes s’élève à 380, soit 6% de l’effectif total. Cette proportion est la plus élevée depuis 2009, même si leur nombre a pu atteindre 396 en 2019 ou encore 401 en 2020.

Lire aussi: La détention dans les cellules de police vaudoises encore pointée du doigt

En matière de détention provisoire – et sans surprise puisque le risque de fuite est une des conditions prévues par le code – 43,4% de l’effectif est constitué d’étrangers sans permis de séjour. Les Suisses représentent 25,2% de ces embastillés, les étrangers avec permis 26,4%, et les requérants d’asile 5%. La grande majorité de ces personnes enfermées avant jugement (76,7%) est âgée de plus de 24 ans alors que le 1,7% n’a pas atteint la majorité.

Lire aussi: Les cantons romands sont champions de la détention

Particularité latine

Un focus sur les cantons latins montre un léger fléchissement du nombre global de détenus. Une baisse sans doute liée aux effets de la pandémie et au recul de certaines formes de criminalité itinérantes, comme les cambriolages ou les vols de rue, gros pourvoyeurs de candidats à la prison.

Source: OFS.
Source: OFS.

Pour la première fois depuis 2011, le taux d’occupation passe ainsi sous la barre des 100%. Il est de 97,2% (encore loin du 86% suisse) pour un total de 2610 places. C’est mieux que le 117,7% de 2014 et ses 2720 détenus pour 2311 places. Sur les 2536 personnes enfermées ce jour de janvier 2022 (dont 5% de femmes), 930 le sont en détention provisoire. Le nombre de 97 détenus pour 100 000 habitants reste toutefois bien supérieur au 72 du niveau national.

Les chiffres des décès

La détention avant jugement reste aussi un haut lieu de désespoir en prison. En 2021, sur 17 décès dénombrés derrière les barreaux pour toute la Suisse, 8 sont considérés comme des suicides, dont 5 commis avant jugement. Depuis 2003, le total de décès oscille entre 9 et 27 par année et celui des suicides entre 2 et 14 par année.

L’écrasante majorité de ces détenus ont mis fin à leurs jours en détention provisoire, où les facteurs de risque sont plus importants: choc de l’arrestation, incertitudes, conditions plus difficiles et promiscuité due à la surpopulation carcérale. Rappelons que les établissements d’exécution de peine – subvention fédérale oblige – ne peuvent être remplis au-delà de leur capacité et que tout l’excédent (même les détenus qui purgent leur sanction) s’entasse dès lors dans les prisons préventives.

Lire enfin: Hans Wolff: «Avec la pandémie, le risque suicidaire a explosé en prison»