L’actrice britannique Charlotte Lewis a relancé la polémique autour du cinéaste Roman Polanski, assigné à résidence en Suisse pour une affaire de moeurs, en l’accusant de l’avoir «abusée sexuellement» au début des années 80, alors qu’elle était âgée de 16 ans. Ce nouveau rebondissement survient au moment où le monde du cinéma est réuni à Cannes pour le Festival du Film, et apparaît divisé sur le soutien à apporter au cinéaste franco-polonais âgé de 76 ans.

La nouvelle accusation est venue de Charlotte Lewis, 42 ans, qui était en 1986 à l’affiche du film de Polanski «Pirates». Elle a tourné depuis dans une trentaine de longs métrages et de séries télévisées. Charlotte Lewis a affirmé vendredi à Los Angeles avoir été «abusée sexuellement» par le cinéaste dans son appartement parisien au début des années 80, alors qu’elle avait 16 ans. Elle a déclaré à la presse, au côté de son avocate Gloria Allred -- une habituée des affaires impliquant des personnalités -- qu’elle avait été «abusée sexuellement de la pire façon possible» par le cinéaste.

Roman Polanski est actuellement assigné à résidence en Suisse dans l’attente d’une éventuelle extradition, après son arrestation en septembre dernier sur mandat américain pour une affaire de «relations sexuelles illégales» avec une mineure, survenues en 1977. «Roman Polanski savait que je ne n’avais que 16 ans quand nous nous sommes rencontrés, et il m’a forcée (à avoir des relations sexuelles avec lui) dans son appartement à Paris», a poursuivi Charlotte Lewis. «Tout ce que je veux, c’est que justice soit faite», a-t-elle déclaré.

Gloria Allred a précisé que sa cliente avait fait une déposition auprès de la police de Los Angeles (LAPD) et du bureau du procureur, espérant que son témoignage serait pris en compte par les autorités suisses au moment de rendre leur décision sur l’extradition du cinéaste. Interrogée sur la décision de Charlotte Lewis de s’exprimer près de trente ans après les faits présumés, l’avocate a répondu qu’»il n’est jamais facile de parler (d’une agression), surtout dans une affaire très médiatisée».

Les avocats de Roman Polanski ont immédiatement menacé de poursuivre la jeune femme en justice. Me Georges Kiejman s’est déclaré «absolument ahuri par les déclarations» de Charlotte Lewis. «Si elle (les) réitère et quand j’en saurai un peu plus, a-t-il ajouté, il est probable que nous la poursuivions en justice». L’avocat a en outre estimé «assez troublant» que Charlotte Lewis ait tourné dans «Pirates», en 1986, c’est-à-dire près de trois ans après les faits présumés. «Trop c’est trop», a déclaré un autre des avocats du cinéaste, Me Hervé Témime. «Tout ce qui est dit est un tissu de mensonges», a-t-il ajouté.

Ce nouveau rebondissement n’a pas ébranlé l’écrivain français Bernard-Henri Lévy, fervent soutien de Roman Polanski depuis son arrestation et qui a lancé une pétition en sa faveur à la veille de l’ouverture du festival de Cannes. L’accusation de Charlotte Lewis «ne change pas un iota à ma position et à ma colère contre les méthodes de la justice californienne», a-t-il déclaré samedi. La veille, il avait déploré le soutien insuffisant apporté, selon lui, au cinéaste par le président du jury du Festival de Cannes, l’Américain Tim Burton.

Quelques heures plus tard, l’acteur Michael Douglas avait annoncé qu’il ne signerait pas la pétition en faveur de Roman Polanski, signée par plusieurs cinéastes présents à Cannes. «Je crois que ce ne serait pas juste pour moi en tant qu’Américain de signer une pétition pour quelqu’un qui a violé la loi», avait-il déclaré.