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Rejoint par Vaud et le Valais, l'espace Mittelland se dilue dans le Léman

Sept cantons prônent désormais une Suisse occidentale à géométrie variable, comme antidote aux projets de fusion

Importante nouvelle donnée à enregistrer, pour les amateurs de géopolitique helvétique: le Mittelland s'étend dorénavant jusqu'au glacier du Rhône et jusqu'à la Versoix. Les cantons de Vaud et du Valais, après avoir assisté de loin à sa création puis s'être contentés d'un statut d'observateur, sont désormais membres à part entière de la convention de collaboration fondée en 1994 par Berne, Neuchâtel, Fribourg, le Jura et Soleure.

Les deux nouveaux venus, qui participent déjà à certains des quinze groupes de travail existants, cofinanceront désormais le secrétariat; ce qui entraînera pour eux une dépense supplémentaire de quelques dizaines de milliers de francs. Parmi les Romands, seul Genève reste en dehors du club. «L'Espace Mittelland compte désormais 2,5 millions d'habitants, répartis entre deux communautés linguistiques de même taille, ce qui lui permettra de jouer de manière optimale son rôle de trait d'union entre Romands et Alémaniques», se réjouit la conseillère d'Etat bernoise Elisabeth Zoelch-Balmer, présidente en exercice. «Canton bilingue, le Valais trouve un cadre idéal dans une région bilingue», s'exclame le Valaisan Wilhelm Schnyder.

La naissance du Mittelland, en 1994, avait pourtant suscité méfiance, voire ricanements du côté de l'arc lémanique, qui n'avait pas vraiment été convié à y participer. «Nous pouvions craindre qu'il s'agisse d'une alliance séparée des cantons du plateau central dirigée contre la région lémanique, et nous ne pouvions y entrer sans autre», souligne le Vaudois Claude Ruey, responsable de la politique extérieure d'un canton qui, vu sa position géographique intermédiaire et la sensibilité de son arrière-pays, se doit de jouer sur les deux tableaux.

Depuis, la situation a évolué. Premièrement, les craintes lémaniques se sont révélées infondées, l'alliance du plateau central ayant prouvé son caractère inoffensif. Même si Claude Ruey veut lui attribuer comme principal mérite le lancement de l'Expo.02, les réalisations communes favorisées par l'Espace Mittelland sont de nature essentiellement technique (pour l'harmonisation du marché intérieur par exemple) et d'une portée si limitée que seuls les experts sont à même d'en énumérer quelques-unes.

A cela s'ajoute que le débat politique a été modifié par l'irruption des idées de fusion. Notamment avec l'aboutissement des initiatives populaires pour l'union Vaud-Genève, dont les promoteurs s'efforcent maintenant de rallier des partisans en Valais, et proposent de redécouper la Suisse en quelques grandes régions. Cet activisme a eu pour effet de donner un coup de fouet au Mittelland, dont les membres veulent désormais incarner, face aux fusionnistes, une politique de «géométrie variable». C'est en tout cas ainsi qu'un canton fondateur comme celui de Berne justifie l'extension de l'espace d'origine et le risque considérable qui en découle: celui de voir cet ensemble se diluer et perdre toute l'homogénéité qu'il avait jusqu'à présent.

Bien que la géographie du Mittelland recoupe désormais la presque totalité d'une future Suisse occidentale (l'Argovie rejoint également certains projets des sept), ses adhérents rejettent toute perspective de bouleversements institutionnels. Les magistrats cantonaux du Mittelland ont multiplié lundi à Berne les déclarations d'intention sur leur volonté de renforcer leurs collaborations, seule manière selon eux, «moins spectaculaire mais réaliste», de régler les problèmes au niveau adéquat. Des promesses faites d'autant plus volontiers que le concept de géométrie variable avancé ne s'embarrasse pas à ce stade d'un contenu bien consistant.

Coopération ou fusion: pas d'opposition de principe

François Cherix, animateur de l'Union Vaud-Genève, ne voit pas d'opposition entre cette dernière démarche et le Mittelland, «puisque ces collaborations permettent de construire la substance de nos futures régions». Pour lui, «tout ce qui émerge en termes de collaborations, provoqué par l'obsolescence des frontières actuelles, est positif». «C'est à force d'opposer une solution à une autre que l'on reste immobile», ajoute-t-il, tout en se disant persuadé que les collaborations intercantonales ne pourront à terme que mener à l'institution de nouvelles régions.