Tout juste rentré en France, Hervé Falciani a accordé une interview dimanche à Mediapart. L’ancien informaticien de HSBC à Genève, qui avait livré aux autorités françaises des milliers de données bancaires en 2009, s’était fait arrêter à Barcelone en juillet 2012. L’Espagne avait finalement refusé de l’extrader le 2 mai dernier malgré un mandat d’arrêt déposé par la justice suisse.

Au site d’information en ligne, Hervé Falciani relate avoir rencontré «dans le plus grand secret» la procureur fédérale Laurence Boillat et le procureur général Carlo Bulletti en février 2012. Malgré le mandat d’arrêt. «Toutes les personnes que j’avais consultées sur le sujet s’opposaient à ce que j’y aille [en Suisse], redoutant un mauvais coup, relate-t-il. Mais j’y suis allé, accompagné de mes avocats.»

Contacté hier, le Ministère public de la Confédération (MPC) confirme qu’une telle rencontre s’est bien «tenue à l’aéroport de Genève et qu’elle a nécessité pour l’occasion l’octroi d’un sauf-conduit au prévenu». Et de préciser qu’elle avait «pour seul but d’examiner, en présence du prévenu et de ses deux avocats, une des possibles modalités de traitement d’une affaire (procédure simplifiée) que prévoit le nouveau Code de procédure pénale suisse». Le MPC n’a pas souhaité commenter le contenu de la discussion «relevant du secret de l’instruction».

Selon Hervé Falciani, l’entrevue visait à «trouver un terrain d’entente et une voie qui pourrait convenir aux deux parties […]. Pendant plusieurs heures, ils exposent leur position sur une entente à l’amiable qui me permettrait de sortir coupable et condamné, mais sans prison ferme. En bref, j’aurais pu aider à enterrer l’affaire, évitant ainsi les risques de représailles. J’ai choisi de ne pas me taire, quitte à payer le prix fort.»

Plus jamais contacté

Hervé Falciani explique ne plus avoir eu de nouvelles des autorités suisses. «Ce qui est assez aberrant, c’est qu’au cours de ces années, la justice suisse a toujours prétendu que je n’étais pas joignable et qu’il était difficile de travailler avec moi, souligne-t-il. C’est faux.» Et d’ajouter que son téléphone reste encore «ouvert». «Ils étaient pourtant si impatients de me voir extradé pour m’interroger.»

Au MPC, on rappelle que l’instruction va désormais être finalisée afin «d’établir un acte d’accusation et de renvoyer ainsi le prévenu devant le Tribunal pour jugement». En attendant, Hervé Falciani sera aujourd’hui auditionné par la commission des lois de l’Assemblée nationale française dans le cadre du projet de loi sur la fraude fiscale, actuellement en discussion au parlement.