Les élus sont toujours d’accord de soutenir la politique familiale. Mais sur le papier. Lorsqu’il s’agit d’adopter une mesure concrète et de délier les cordons de la bourse, le pas est beaucoup plus difficile à franchir. Le Conseil des Etats en a apporté une nouvelle preuve lundi. Après un débat vif, il a cependant fini par accepter par 24 voix contre 19, contre l’avis de sa commission, d’entrer en matière sur un projet visant à engager cent millions de francs suisses sur cinq ans pour contribuer aux frais de garde des enfants.

Saturation et cherté des crèches

Car le coût des crèches est élevé en Suisse. Et l’offre pas toujours adaptée à la demande. De quoi décourager des parents, et surtout des mères, à travailler ou à augmenter leur taux d’activités. Le programme dont il était question lundi comporte deux parties: une aide financière pour augmenter les subventions cantonales et communales à l’accueil extra-familial, ce qui a une incidence directe sur le porte-monnaie des ménages, et un soutien aux projets répondant aux besoins de souplesse des parents.

Les sénateurs ont fait preuve de mauvaise volonté. Les représentants du PLR et de l’UDC ont rappelé que l’accueil extra-familial était une tâche cantonale et communale. Ils ont plaidé pour un autre instrument: l’augmentation des déductions fiscales pour frais de garde. Ruedi Noser (PLR/ZH) a aussi rappelé que la Confédération a introduit en 2003 déjà un programme d’impulsion pour favoriser la création de places d’accueil. Lequel a été prolongé à deux reprises. «Ces programmes ont été un succès, admet-il. Sauf que la situation varie d’un canton à l’autre et je crains que ceux qui n’ont rien entrepris ces dernières années ne fassent toujours rien à l’avenir. Si bien que la situation restera la même».

Cantons ou Confédération ?

Le conseiller fédéral Alain Berset a apporté au débat sa version du fédéralisme: «Le fédéralisme, ce n’est pas une muraille de Chine entre la Confédération et les cantons. Le fédéralisme, c’est aussi la solidarité entre les cantons, et entre la Confédération et les cantons». Et il fait de son projet «un enjeu d’importance nationale». Pour trois raisons: la Suisse doit lutter contre la pénurie de personnel qualifié, elle doit aussi appliquer la volonté populaire de mettre à contribution le personnel indigène pour freiner l’immigration, et elle doit, enfin, améliorer sa politique de soutien aux familles.

C’est finalement le PDC qui a fait pencher la balance en corrigeant la décision de la commission de ne pas entrer en matière. Pour la petite histoire, le 7 novembre dernier, le projet a été recalé à une voix près, celle de la présidente de la commission, la PDC Brigitte Häberli-Koller. La presse alémanique n’a pas manqué de relever la position du parti auto-proclamé de la famille. Lundi, le chef du groupe parlementaire, le Tessinois Filippo Lombardi, est ainsi monté au filet pour rappeler les troupes à l’ordre.