COÛTS
Le préposé à la Surveillance des prix Stefan Meierhans, qui à ce titre a fait partie du panel d’experts, explique les conclusions du rapport

Le Temps: Le rapport a été très critiqué après sa publication. Dans quel climat vos débats se sont-ils déroulés?
Stefan Meierhans: Dans un climat très rationnel. Je peux vous assurer d’une chose: jamais nos débats n’ont été de nature politique. Surtout, ce rapport a été approuvé à l’unanimité du groupe.
– Ce rapport prend l’allure d’un réquisitoire. Le système actuel de santé est-il si lacunaire?
– Oui. Il n’y a pas de pilotage d’ensemble, ni de contrôle global de l’évolution des coûts. La commission d’experts a constaté que certaines mesures, comme l’adaptation des marges relatives à la distribution des médicaments, sont sur la table depuis longtemps. Mais il y a eu un échec systématique à les mettre en place.
– Vous proposez de limiter la hausse annuelle des coûts à 2,7%. Comment êtes-vous parvenus à ce chiffre?
– Personnellement, je pense qu’il faudrait comparer la hausse des coûts de la santé à celle des salaires. Dans ce cas, ces coûts ne devraient croître qu’à raison de 1,4% par an. Même cet objectif resterait réaliste dans la mesure où 20% des coûts sont inutiles dans l’assurance de base. Le chiffre de 2,7% que le groupe d’experts a retenu a été calculé sur la base du PIB.
– Qu’attendez-vous du plafonnement du volume des prestations?
– Dans un premier temps en tout cas, il est nécessaire pour inciter la branche à économiser. Soit on l’effectue sous la forme d’une baisse des tarifs dans l’année qui suit pour compenser le dépassement constaté. Soit on institue un forfait par prise en charge d’un patient, comme on le fait déjà à l’étranger, en Suède par exemple. Dans les deux cas, on réduit l’incitation à faire du chiffre d’affaires en offrant plus de prestations.
– Le rapport demande un contrôle annuel du prix des médicaments. Ne faudrait-il pas engager de nombreux fonctionnaires pour mettre en place une telle mesure?
– En raison d’un différend qu’a dû trancher le Tribunal fédéral, certains médicaments n’ont pas été contrôlés depuis cinq ans. Leur prix se base donc encore sur un taux de change à 1 fr. 28 pour un euro, alors que celui-ci a oscillé ces dernières années entre 1 fr. 05 et 1 fr. 15. Les entreprises pharmaceutiques profitent donc de l’inertie du système, et contrairement à ce que l’on pense, ce sont surtout les multinationales étrangères qui en bénéficient le plus, car quelque 75% des médicaments consommés en Suisse ne sont pas produits ici!
– Le groupe d’experts propose un article expérimental. Dans quel but?
– Cette mesure est totalement nouvelle. Elle consisterait à permettre de lancer des projets pilotes dans un seul canton sans avoir à modifier préalablement la loi sur l’assurance maladie (LAMal). Je crois que notre fédéralisme est un atout. Il faut essayer pour savoir. On pourrait par exemple tester un système de gratification pour les hôpitaux qui travaillent bien si les statistiques montrent qu’ils déplorent très peu de cas de réhospitalisation après une intervention chirurgicale.
– Ne craignez-vous pas que les 38 mesures proposées ne serviront pas à grand-chose du fait que les divers acteurs de la santé ne tirent jamais à la même corde?
– C’est justement pour cela qu’il faut instaurer un plafond à la hausse des coûts, car il s’agit de la seule possibilité d’éviter le danger que vous évoquez. Ces derniers mois, je constate une prise de conscience du monde politique qu’on ne peut plus continuer ainsi. Mais probablement que ce sera au peuple de trancher en dernier ressort.