La succession d’Isabelle Chassot pourrait mal tourner à droite
fribourg
L’élection complémentaire au Conseil d’Etat a lieu le 22 septembre.La gauche part unie derrière Jean-François Steiert. Au PDC, l’idée d’une alliance avec le PLR et l’UDC divise
La gauche sera-t-elle bientôt majoritaire au gouvernement fribourgeois? En nommant la conseillère d’Etat PDC Isabelle Chassot à la tête de l’Office fédéral de la culture, le conseiller fédéral socialiste Alain Berset pourrait en effet offrir ce joli cadeau à son parti.
L’élection complémentaire a lieu le 22 septembre. Les démocrates-chrétiens se sont rangés derrière Jean-Pierre Siggen, le chef de leur groupe au Grand Conseil. Mais le PS fribourgeois part au combat avec un candidat qui n’a pas été choisi pour faire de la figuration: Jean-François Steiert.
Le conseiller national est sorti du bois la semaine dernière et les autres prétendants socialistes se sont immédiatement inclinés. Il sera ainsi très probablement ovationné mercredi soir par l’assemblée des délégués du PS fribourgeois. «La campagne sera courte. Nous devons donc être offensifs et partir immédiatement unis derrière la personne susceptible de remporter le plus de voix possible, soit Jean-François Steiert», estime David Bonny, ancien président cantonal du PS, qui était sur les rangs jusqu’à la semaine dernière.
L’intéressé reste pour sa part prudent. «J’ai estimé avoir suffisamment de chances pour me lancer», confie Jean-François Steiert. Mais même à droite, on reconnaît les qualités de l’adversaire. Constructeur de majorités sous la coupole fédérale, parfaitement bilingue, le socialiste maîtrise les dossiers de la conseillère d’Etat en partance. A Berne, il siège à la Commission de la science, de l’éducation et de la culture. Professionnellement, il travaille pour la ministre vaudoise Anne-Catherine Lyon. Délégué aux affaires intercantonales, il la représente à la Conférence suisse des directeurs cantonaux de l’instruction publique, présidée par… Isabelle Chassot. Il est également un interlocuteur incontournable à Berne pour toutes les questions liées à la santé et occupe la fonction de vice-président de la Fédération suisse des patients. Pour ne citer que ce mandat, parmi une trentaine d’autres.
La droite a donc de bonnes raisons d’être inquiète. Sur le papier, elle est majoritaire à Fribourg. Mais les socialistes ont le vent en poupe. Après les élections fédérales et cantonales de 2011, le PS fribourgeois a fêté l’élection au Conseil fédéral d’Alain Berset, puis celle de Christian Levrat pour lui succéder au Conseil des Etats. Au tour de Jean-François Steiert de gravir une nouvelle marche et de faire basculer le gouvernement fribourgeois, actuellement formé de deux PS, d’une Verte, de trois PDC et d’un radical?
Jean-Pierre Siggen devra batailler ferme pour maintenir la composition actuelle du gouvernement. Député au Grand Conseil, chef du groupe PDC, il est aussi directeur de l’Union patronale du canton de Fribourg, et la gauche n’hésitera pas à le présenter comme le candidat de la droite économique. Elle n’hésitera pas non plus à faire campagne sur les mesures d’économies que le Conseil d’Etat a présentées ce printemps et qui mettent notamment les fonctionnaires en ébullition. Jean-François Steiert était d’ailleurs récemment orateur de la manifestation organisée à Fribourg par les syndicats.
«Je n’adhère pas entièrement à toutes les mesures d’économies préconisées, se défend Jean-Pierre Siggen. Et je sais que les critiques sur mon profil patronal vont pleuvoir. Mais l’économie fribourgeoise, c’est surtout un tissu de PME. Elle forme des apprentis, s’engage pour l’adoption de conventions collectives. Dommage que le partenariat social et le sens du consensus ne fassent jamais la une des médias», poursuit celui qui compte bien défendre le dynamisme de l’économie et la création d’entreprises «face aux jérémiades de la gauche».
Reste que, pour Jean-Pierre Siggen, l’adversaire ne se situe pas seulement à gauche. Dans son propre parti, c’est actuellement l’ébullition autour d’une alliance regroupant le PDC, le PLR et surtout l’UDC. Autant dire le diable pour de nombreux démocrates-chrétiens! Faut-il vraiment en passer par là pour conserver le siège? Peut-on se permettre de partir seul avec le risque que l’UDC lance aussi un candidat et divise les voix de la droite? Le PDC tranchera la semaine prochaine (lire ci-dessous).
Jean-Pierre Siggen est favorable à une alliance. Il regrette de voir la droite travailler ensemble durant la législature et s’écharper lors des élections, contrairement à la gauche qui sait s’unir lorsqu’il le faut, analyse-t-il. «Nous ne faisons aucun compromis sur notre programme car nous ne partageons pas les valeurs de l’UDC, insiste Eric Menoud, président cantonal du PDC. Mais ce qui est en jeu, c’est la majorité de droite au Conseil d’Etat et cette alliance améliore nos chances de la conserver.» Un pragmatisme qui ne fait pas l’unanimité, surtout au sein de la base, qui pourrait se détourner du PDC en cas d’alliance.
Le PDC a une autre épine dans le pied qui a pour nom Emanuel Waeber, son ancien président cantonal passé à l’UDC. Une alliance à plus long terme pourrait en effet lui être profitable. Au sein de l’UDC, deux sources confient que le PDC a voulu exclure Emanuel Waeber des prochaines listes communes en cas d’alliance. Avant de revenir à de meilleurs sentiments.
«J’ai estimé avoir suffisamment de chances de l’emporter pour me lancer»