L’ex-conseiller fédéral et ex-président de la Confédération Joseph Deiss, 63 ans, a été choisi par le Groupe des Etats occidentaux pour assurer la présidence de l’Assemblée générale des Nations unies pour la 65e session. En compétition avec l’ex-ministre des Affaires étrangères belge Louis Michel, le Fribourgeois, qui avait défendu à l’époque l’adhésion de la Confédération à l’ONU, se dit fier de pouvoir occuper cette fonction. La nomination de Joseph Deiss doit être encore confirmée par l’Assemblée générale elle-même en mai ou juin prochain. Une simple formalité, dit-on. L’ancien conseiller fédéral livre sa réaction.
Le Temps: Comment réagissez-vous au fait d’avoir été choisi par les 29 Etats occidentaux (l’Europe occidentale, l’Australie, la Nouvelle-Zélande, le Canada, Israël) pour assurer la présidence de l’Assemblée générale de l’ONU à New York?
Joseph Deiss: Je suis fier pour la Suisse de pouvoir occuper cette haute fonction. A titre personnelle, je trouve bien entendu cette nomination fantastique. Mais je rappelle que cette candidature n’était pas personnelle, c’était celle du Conseil fédéral. Je n’avais jamais songé à exercer une telle fonction. Le premier mérite de ce choix revient au Conseil fédéral et à la cheffe du Département fédéral des affaires étrangères Micheline Calmy-Rey qui, dès ce printemps, a eu le courage de lancer et de défendre ma candidature. Ce qui compte, finalement, c’est la place plus visible que va occuper la Suisse dans l’enceinte onusienne.
– La Suisse avait refusé, lors d’une votation fédérale, d’adhérer à l’ONU en 1986 (75,7% de votes défavorables) et n’adhérera qu’en 2002 après un vote favorable du peuple de 54,6%. Comment expliquez-vous que les Etats occidentaux aient appuyé votre candidature?
– Je ne connais pas les raisons du vote des 29 pays occidentaux. Le vote s’est effectué à bulletins secrets. Mais ce que je peux dire, c’est que la Suisse dispose d’une diplomatie qualifiée et efficace aussi bien à la section de l’ONU à Berne qu’à l’ambassade de New York. De plus, le Conseil fédéral a voulu déposer une candidature crédible par laquelle la Suisse montre qu’elle veut faire avancer les choses et est capable de le faire grâce à son expérience. Je note par ailleurs que l’ONU envoie ainsi un message à la Suisse: elle prouve qu’on peut jouer un rôle actif au sein de l’ONU sans remettre en cause notre neutralité.
– Vous étiez en compétition avec l’ex-ministre belge des Affaires étrangères Louis Michel. Fut-ce un combat à couteaux tirés?
– Pas du tout. Nous avons tous deux mené une campagne déterminé, mais ne sommes en aucun cas tombés dans des excès. Au contraire, je rends hommage à mon concurrent belge avec lequel nous avons livré une campagne tout à fait correcte.
– Après votre désignation par le groupe occidental, votre élection à la présidence de l’Assemblée générale devrait être une formalité en mai ou juin prochain. Après le vote interdisant la construction de minarets en Suisse, craigniez-vous néanmoins un retour de flamme qui vous empêcherait d’accéder au perchoir de l’ONU?
- Je ne crains jamais rien en politique. Au vu de ce vote, nous allons continuer à édifier la candidature suisse. Je vais personnellement prendre contact, je l’espère, avec tous les Etats membres pour montrer quelles sont les valeurs que la Suisse entend défendre à cette fonction.
– Comment envisagez-vous cette présidence?
– J’ai de l’expérience dans le multilatéralisme. Je vais donc faire en sorte d’être impartial, montrer que je suis le président de tous et que je travaille à créer les meilleurs conditions de travail pour l’Assemblée général. Je devrai être un arbitre neutre et montrer une aptitude à apporter des solutions de compromis. Cela ne doit pas m’empêcher de tenter, quand cela s’avérera nécessaire, de faire passer un règlement en force, de provoquer des contacts pour trouver des solutions. J’aimerais, à la fin de ce mandat, avoir l’honneur de pouvoir dire que la Suisse a bien fait son travail.