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Au bureau avec bébé, ou presque

Réserver une place de crèche et une place de travail en même temps selon les besoins, c’est désormais possible à Zurich

Coco, 11 mois, dans l’espace crèche de Tadah. — © Dominic Büttner pour Le Temps
Coco, 11 mois, dans l’espace crèche de Tadah. — © Dominic Büttner pour Le Temps

Vendredi à l’heure du lunch, Denise a rendez-vous avec sa fille Hanna, 3 ans, pour partager sa pause de midi à la crèche Tadah. Une fois le repas terminé, elle la laisse entre les mains de l’éducatrice et retourne travailler deux étages plus haut, dans le même immeuble. «Je fais du home office tous les vendredis mais depuis que ma fille dort moins durant la journée, c’est plus compliqué. Ici, je peux travailler sans interruption, tout en restant proche d’elle», s’enthousiasme la maman et graphiste de 38 ans.

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Espace de coworking d’un nouveau genre qui vient d’ouvrir ses portes à Albisrieden, un quartier de la banlieue zurichoise en pleine mutation, Tadah donne la possibilité de louer une place de travail et de déposer son enfant dans une infrastructure de garde, sous le même toit. L’endroit aux plafonds hauts et murs de béton, meublé avec soin dans des matériaux durables, peut accueillir 30 personnes. Contrairement à une crèche classique où l’on paie un montant fixe pour un nombre de jours défini, Tadah mise sur la flexibilité.

© Dominic Büttner pour Le Temps
© Dominic Büttner pour Le Temps

L’offre commence par une formule «drop-in» à partir de 90 francs pour une demi-journée de «coworking avec garde» pour un enfant (165 francs par jour), à réserver 48 heures à l’avance. Un abonnement pour quatre journées de bureau et crèche par mois se monte à 595 francs, soit environ le même prix que pour une infrastructure d’accueil classique privé (sans place de travail) à Zurich. Enfin, le tarif pour cinq jours sur cinq de 8h à 18h pour un adulte et un enfant se monte à 2770 francs par mois.

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«Trop de femmes quittent le monde du travail»

Quand Sarah Steiner, cofondatrice, revient au travail après quatorze semaines de congé maternité suite à la naissance de sa fille Malou il y a cinq ans, elle se retrouve vite confrontée à un dilemme: «J’aurais aimé allaiter plus longtemps, c’est un droit et mon employeur était ouvert à des arrangements. Mais avec quarante-cinq minutes de transports entre mon bureau et la crèche, c’était simplement impossible.»

© Dominic Buettner pour Le Temps
© Dominic Buettner pour Le Temps

Ce n’est que la première des frictions qu’éprouvera la journaliste, confrontée à la rigidité des structures d’accueil classiques, peu adaptées à son rythme de travail irrégulier. Sarah Steiner sait bien qu’elle n’est pas la seule, elle qui tient, avec trois amies qui deviendront les cofondatrices de Tadah, un magazine consacré aux questions de conciliation entre travail et famille. «C’est un problème qui touche l’économie dans son ensemble: trop de femmes qualifiées quittent le monde du travail parce qu’elles ne trouvent pas de solution satisfaisante.»

«En Suisse où le congé maternité est court, nous avons un besoin urgent de meilleures solutions», souligne de son côté Julia Cebreros, cofondatrice. Designer de formation, Julia allaite sa fille Coco, 11 mois, et travaille trois jours par semaine à Tadah. Lorsque son bébé a faim, une éducatrice l’appelle et elle descend au Kid’s Space, où elle peut utiliser le lit dédié à l’allaitement. «Je n’ai pas besoin de trancher entre mes besoins professionnels et ceux de mon enfant», souligne-t-elle.

Tadah se voit comme un espace de partage entre professionnels, mais aussi une communauté dédiée à rendre la vie des parents plus simples. Sylvianne, la maman de Sarah, en fait partie, elle qui vient s’occuper des enfants un jour par semaine à la crèche. Sur ce modèle, les fondatrices s’attellent à construire un réseau de grands-parents pour venir en renfort aux éducatrices, dans l’idée de créer un lien entre générations.

Partenariats avec des entreprises

Avec un investissement de départ de 650 000 francs et quelque 70 000 francs récoltés par crowdfunding, Tadah a de quoi tourner durant douze mois, le temps de se lancer. Pour les jeunes parents, les coûts peuvent s’avérer prohibitifs: n’étant pas une structure d’accueil officielle, Tadah n’entre pas dans le réseau de lieux de garde subventionnés. «Notre offre n’est pas accessible à tous. Mais nous ciblons un type de travailleurs de plus en plus fréquent: des personnes mobiles, qui peuvent choisir où travailler et ont un grand besoin de flexibilité. Nous remarquons aussi un grand intérêt du côté des jeunes papas», souligne Sarah Steiner.

Tadah fait office d’exception en Suisse alémanique dans le vaste marché des espaces de coworking – il existe un concept similaire à Lausanne: The Village. Mais ses fondatrices sont convaincues de répondre à des besoins exponentiels: elles espèrent ouvrir une succursale à Zurich, puis dans d’autres villes de Suisse. Elles misent aussi sur les entreprises, leur proposant de louer une place de travail avec garde pour leurs employés, par exemple dans une période où ils auraient particulièrement besoin de flexibilité. «Les employeurs sont conscients que, pour éviter de perdre des talents, ils ont intérêt à s’adapter aux besoins des jeunes parents», remarque Sarah Steiner.