Au lendemain des élections zurichoises, la presse alémanique dresse son analyse des résultats. Pas tendres avec les Vert·e·s, les médias évoquent notamment la concurrence confirmée des Vert’libéraux, qui font figure de parti plus modéré. A huit mois des élections fédérales, tout le monde s’accorde à affirmer que le temps est à la stabilité plus qu’au changement.

«Apparemment, les Zurichois n’ont guère envie de changement», analyse la SRF qui évoque «des changements mineurs» lors des élections de dimanche. Après la vague verte de 2019, les résultats du week-end laissent place à une certaine constance. Les Vert’libéraux, annoncés gagnants dans les sondages d’avant élection, gagnent un siège, mais leur part des voix diminue légèrement. «Ceci à Zurich, où le parti est né et est solidement ancré. On a l’impression que le parti a épuisé son potentiel», constate le Tages Anzeiger.

Ce dernier estime qu’avec trois sièges de moins, les Verts sont «les grands perdants de la journée» mais aussi les principaux responsables de l’affaiblissement de leur «soi-disant» alliance pour le climat qui ne possède désormais plus qu’une mince minorité de 91 sièges contre 89. «La question climatique n’est plus un succès infaillible», poursuit le quotidien alémanique qui imagine que les questions liées à l’approvisionnement énergétique du pays ont affaibli le parti écologiste.

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«D’où la question pour les Verts: sur quoi se concentrer? Si le parti veut revendiquer sérieusement un siège au Conseil fédéral à l’automne, il doit trouver des réponses. Appeler à la «Protection du climat!» ça ne suffit pas.»

A l’autre bord de l’échiquier politique, l’UDC se renforce légèrement. Le journal du groupe Tamedia estime que le parti de droite exploite une évolution démographique. «La Suisse dépassera cette année la barre des neuf millions d’habitants. Le slogan «9 millions de Suisses» déclenche de vives émotions.» Ou plus simplement, avec Natalie Rickli et Ernst Stocker qui siègent à l’exécutif, «la section zurichoise compte dans ses rangs deux conseillers d'Etat qui sont populaires bien au-delà de leur base».

Pour sa part, La Liberté rappelle que «l’UDC récupère un siège, après en avoir perdu neuf il y a quatre ans. Le parti avait alors réalisé son plus mauvais score depuis le milieu des années 1990.» Peu relevé dans les journaux alémaniques, le Parti socialiste (PS) – deuxième parti du canton – gagne aussi un siège en réalisant les mêmes résultats électoraux qu’en 2019 (19,3%). «Il s’agit d’une surprise, les sondages ayant prédit une défaite», note le quotidien fribourgeois.

C’est beaucoup plus difficile que de se prélasser dans la gloire résiduelle de sauveur du monde autoproclamé

Die Weltwoche fanfaronne en osant parler de «triomphe bourgeois» au gouvernement. L’hebdomadaire zurichois n’épargne pas Dominik Waser, candidat écologiste et grand perdant du week-end. Le journal proche de l’UDC affirme qu’après avoir expliqué «au reste de l’humanité comment il faut vivre», le Vert doit désormais «apprendre à perdre». «C’est beaucoup plus difficile que de se prélasser dans la gloire résiduelle de sauveur autoproclamé du monde.»

Au sortir des élections, l’écologiste a réagi sur Twitter: «Le fait que les trois conseillers d’Etat de droite soient de loin les mieux élus fait peur.» La Weltwoche réplique… dans son style: «Nous pouvons rassurer Dominik Waser à ce stade: il n’a pas à avoir peur. Les trois qu’il a dénigrés font partie des politiciens zurichois les plus expérimentés et les plus distingués et ont prouvé, surtout en temps de crise, qu’ils peuvent trouver des alliances entre les partis et travailler de manière orientée vers les solutions.»

La NZZ a opté de son côté pour une analyse plus distancée, en titrant: «Économie, éducation, climat: la bourgeoisie doit désormais occuper ces trois champs». Le quotidien alémanique estime que «parler d’un glissement vers la droite» est exagéré. Au mieux, c’était «un tout petit glissement», écrit-t-il, rappelant qu’au sein du Conseil d’Etat, les sept membres ont été réélus.

Le journal zurichois espère que «de nouvelles alliances» verront le jour afin de dépoussiérer les vieux arrangements de gauche qui n’ont rien amené de positif lors de la dernière législature. «Les Verts’libéraux doivent prendre acte de ces résultats» car «il existe un besoin aigu d’action et de réelles opportunités de changement» dans le canton le plus peuplé du pays.

«La tendance est aux valeurs centristes»

Le correspondant zurichois du Temps évoque de son côté «des équilibres parlementaires presque parfaitement identiques, opérant un infime mouvement vers la droite.» Et d’ajouter: «Après la «vague verte» de 2019, les élections cantonales zurichoises donnent avant tout une indication: la tendance est aux valeurs centristes.» En effet, le Centre a gagné trois sièges. Selon ses responsables, le parti a probablement bénéficié de la fusion entre le PDC et le PBD ainsi que de sa dénomination désormais «moins rédhibitoire» en milieu urbain.

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Le Temps évoque aussi la défaite «marquée (…) du très médiatique Peter Grünenfelder, candidat PLR à la reconquête du siège historique perdu par son parti en 2019, qui termine à près de 40 000 voix du septennat de tête.» Le candidat malheureux a appelé le PLR zurichois à une «rapide autocritique».

A huit mois des élections nationales, le Blick considère que le scrutin de dimanche constitue un important «test d’humeur». Pour analyser les résultats, le journal a interviewé le politologue Claude Longchamp. Ce dernier estime «qu’en temps de guerre et de pénurie d’énergie en Suisse, l’accent est davantage mis sur les personnes et les partis modérés». Il ajoute que «la météo favorable devrait être terminée pour les Verts» et que le parti écologiste devra désormais accepter la concurrence des Vert’libéraux.

Egalement cité dans le Blick, Balthasar Glättli, président des Verts, analyse les résultats zurichois du week-end en parlant d’un «coup de semonce» pour les élections nationales.

Questionné par Watson, le politologue Pierre Lüssi ne s’attend «pas non plus à de grands bouleversements lors des élections fédérales». Selon lui, «les préoccupations des écologistes ne sont plus si fermement dans l’œil du public» qu’il y a quatre ans. En revanche, les incertitudes liées à la pénurie d’électricité et aux prix peuvent encore avoir une certaine influence sur le vote de la population.

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