Reportage
De violents orages ont frappé Zurich pendant la nuit de lundi à mardi. Le 118 a enregistré plus de 1000 appels d’urgence. Les transports publics étaient encore largement bloqués dans la matinée

«C’est ma voiture!» s’exclame un Allemand. Enseveli sous les troncs et les branches d’arbres, le véhicule n’est pas près de redémarrer. Impossible, même, de se rendre compte des dommages: une petite jungle de branches, de feuilles et même de troncs l’emprisonne. Son propriétaire est perplexe: «Ils vont venir? Qui faut-il appeler?»
Il est à peine 7h à Zurich et plusieurs habitants de Guggach Park, un complexe de plusieurs immeubles dans le nord de la ville, sont venus constater les dégâts des violents orages de la nuit de lundi à mardi. Entre deux averses diluviennes, des enfants grimpent sur les troncs qui jonchent la rue tandis que les adultes photographient les dégâts sous tous les angles.
«Horizon blanc»
Installés au pied du Käferberg, les résidents étaient aux premières loges. Plusieurs immenses arbres de la forêt se sont écrasés sur la route, parfois heurtant les immeubles dans leur chute. «Je n’ai rien entendu, mais mon mari a regardé l’orage. Enfin, regardé, c’est une façon de parler: on ne voyait plus rien, l’horizon était blanc avec la grêle», raconte Holly, une New-Yorkaise fraîchement débarquée en Suisse. Elle a beau avoir vu des inondations parmi les plus spectaculaires dans sa ville, elle n’en est pas moins impressionnée.
Tout comme cette Néo-Zélandaise, qui rappelle que «nous avons des tremblements de terre d’un certain niveau assez régulièrement. Mais, ça, c’était dix fois plus effrayant que ce que j’ai jamais vu.» Isla dit avoir eu «par moments, l’impression que c’était une tornade tellement le vent était incroyablement rapide. Mes jambes ont tremblé pendant 45 minutes après l’orage parce que j’ai eu peur que nos vitres explosent.»
Pire ailleurs
Un peu plus loin, un employé de la voirie tente de déboucher une grille d’égout bloquée par des feuilles à mains nues. Il est 10h quand il s’attaque avec un collègue à cette rue particulièrement touchée. Il faudra compter au moins jusqu’à après-demain, probablement davantage, pour qu’elle soit libérée des restes de la forêt. L’homme est sur le pont depuis trois heures. Il est formel: ce n’est pas ici «le pire», assure-t-il. A Schwammendingen, plus au nord-est de la ville, les dégâts sont encore plus impressionnants, dit-il.
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La nuit de lundi à mardi a été marquée par des orages particulièrement violents dans le canton de Zurich, avec des vents impétueux (plus de 100 km/h) et souvent accompagnés de grêle. MeteoNews a enregistré environ 9000 éclairs. D’après SRF Meteo, il est tombé 27,1 millimètres de pluie en 10 minutes à Affoltern et 25 millimètres à Opfikon, deux quartiers plus au nord de la ville. Albisrieden aussi a été très touché. Mais c'est à Waldegg, derrière le sommet de l'Uetliberg, que les averses ont été les plus fortes: 31,1 millimètres, du presque jamais vu. Le record suisse est détenu par Lausanne en 2018 (41 millimètres).
Les services de secours disent avoir reçu plus de 1000 appels d’urgence au plus fort des intempéries. Les pompiers ont dû intervenir plusieurs centaines de fois, tandis que le courant a été coupé dans quelques quartiers. Mais aucun blessé n’a été signalé pendant la nuit. Plusieurs lignes de trains dans la banlieue zurichoise ont été coupées momentanément. Les trams ont circulé de façon réduite avant de reprendre à une cadence habituelle, tandis que plusieurs bus étaient encore suspendus en cours de matinée. Les pluies, elles, ont repris avec vigueur et devraient continuer pendant la semaine, suscitant des inquiétudes sur le niveau du lac, de la Sihl et de la Limmat, les rivières qui traversent la plus grande ville de Suisse, qui menacent de déborder.
Le lac de Zurich a atteint le niveau 4 sur 5 (fort danger de crues) ce mercredi après-midi. Avec les pluies qui continuent, l'eau monte toujours. «Le niveau de la Limmat va continuer à augmenter ces prochains jours en raison du haut niveau du lac», a averti le canton, qui estime que des inondations locales pourront se produire autour des rivières zurichoises. Des travaux ont en outre été entrepris pour réduire l'eau du lac de Sihl dont la rivière se jette ensuite dans la Limmat.
La situation, souligne la Neue Zürcher Zeitung, rappelle celle de 2005, où la Sihl avait été à deux doigts de déborder. Il s'en était fallu de peu (les pluies s'étaient alors dirigées sur l'Oberland bernois) pour que le centre-ville ne se retrouve sous cinquante centimètres d'eau sur plusieurs kilomètres carrés. C'est ce cours d'eau qui pose le plus de problème. Une grande partie du centre-ville est construite dans le cône alluvial de la Sihl, qui est une plaine inondable naturelle. Le fait que toute la surface - et plus seulement les zones abritées - est désormais bâties renforce les risques, prévient le quotidien zurichois.
Revoir:
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