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«La Suisse retrouve une voix crédible à l’OCDE»

Pierre de Pena, vice-président du Groupement des entreprises multinationales (GEM), se félicite du double résultat fédéral et genevois sur la nouvelle fiscalité des entreprises

Vue aérienne de Genève, le 3 mai 2019. — © Keystone
Vue aérienne de Genève, le 3 mai 2019. — © Keystone

Le vote de dimanche sur la RFFA marque la fin du long feuilleton des «statuts spéciaux» par lesquels les cantons ont attiré de nombreuses sociétés. Pierre de Pena, responsable de la fiscalité pour l’Europe, l’Afrique et le Moyen-Orient chez Caterpillar, réagit au nom du Groupement des entreprises multinationales (GEM), qui réunit 95 sociétés implantées essentiellement sur l’Arc lémanique.

Lire aussi notre commentaire:  RFFA: la fin d’un chapitre, pas davantage

Le Temps: Que saluez-vous principalement dans ce vote?

Pierre de Pena:  Ces résultats lèvent une très forte incertitude. Les statuts fiscaux cantonaux n’étaient plus compatibles avec les nouveaux standards de la fiscalité internationale. Les membres de notre groupement appelaient ce changement de leurs vœux depuis longtemps. Le résultat permet à la Suisse de rester compétitive tout en étant en paix avec ses voisins.

Un petit pays comme la Suisse doit s’adapter de manière pragmatique à l’évolution du contexte légal international, on l’a déjà vu avec le secret bancaire

Pierre de Pena

Convenez-vous aujourd’hui que ces statuts fiscaux cantonaux sont injustes?

Fondamentalement, je ne le pense pas. Ils étaient du reste disponibles pour toute entreprise dont les activités étaient principalement tournées vers l’international, qu’elles soient majoritairement suisses ou étrangères. Mais un petit pays comme la Suisse doit s’adapter de manière pragmatique à l’évolution du contexte légal international, on l’a déjà vu avec le secret bancaire. Il ne serait pas tenable de s’isoler alors que les Etats s’alignent dans l’ensemble. Avec son vote de dimanche, la Suisse retrouve une voix crédible à l’OCDE, où se poursuit un débat de fond: dans quel pays faut-il imposer les multinationales? Là où la valeur se crée ou dans le marché final de ses utilisateurs?

J’imagine que le vote de Genève vous réjouit particulièrement?

Disons que nous étions inquiets! Dans le canton de Vaud, un accord politique est arrivé très tôt, tandis que cela a été plus compliqué dans le canton de Genève. Je pense que le résultat positif de ce dimanche s’explique par l’existence d’un compromis équilibré, avec un volet social important.

Outre l’harmonisation du taux, la réforme met à la disposition des sociétés divers instruments. Les multinationales paieront-elles vraiment plus d’argent?

Oui, clairement! Ces instruments incitatifs existent en effet, mais chaque canton peut décider de plafonner leur effet au niveau approprié. Prenons le cas de Genève: le taux unique prévu de l’impôt sur le bénéfice est de 13,99%. Mais le taux plancher, avec l’utilisation de ces outils, ne pourra pas descendre au-dessous de 13,49%. Des taux qu’il faut comparer avec la norme actuelle pour les entreprises à statut spécial, qui est en moyenne de 11,6%.

Le Parti socialiste suisse (PSS) annonce le lancement d’une initiative pour l’harmonisation de la fiscalité des entreprises, afin de prévenir la concurrence fiscale entre cantons. Qu’en pensez-vous?

Nous serons heureux d’en débattre avec le PSS. Mais je ne vois pas vraiment à l’horizon de concurrence intercantonale dévastatrice. Il me semble au contraire que les cantons sont arrivés d’eux-mêmes à fixer des taux raisonnables et plutôt alignés.