En Suisse romande, un retour à l’école progressif
Coronavirus
Si tous les cantons romands instaurent l’enseignement en alternance, Genève et Vaud restent très prudents sur la durée de cette transition, tandis que Neuchâtel, le Jura et le Valais veulent un retour rapide aux classes complètes

Une reprise progressive sous haute surveillance. C’est ainsi que se dessine le retour à l’école en Suisse romande. Alors que la responsabilité sanitaire incombe à la Confédération, les cantons sont chargés du volet organisationnel pour préparer une rentrée du 11 mai sous haute tension. De fait, tous les aspects de la vie scolaire doivent être repensés à l’aune du coronavirus. Le mot d’ordre du dispositif intercantonal? L’alternance, qui vaudra pour la présence en classe, les récréations ou encore les repas.
Des disparités cantonales apparaissent en revanche sur la durée de cette phase transitoire. Si Genève prévoit un retour aux classes complètes dans l’ensemble de l’enseignement obligatoire le 8 juin, Vaud table sur le 29 mai, tandis que Neuchâtel et le Jura évoquent la date du 25 mai et le Valais même celle du 18 mai pour le primaire. Quant à Fribourg, il dévoilera son plan d’action vendredi. Le Syndicat des enseignants romands déplore «que la coordination annoncée ne soit pas réelle». Pour son président, Samuel Rohrbach, un retour aux classes complètes est «incompatible» avec les mesures sanitaires imposées.
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Des classes de primaire complètes dès le 18 mai en Valais, n’est-ce pas prématuré? «Il n’y a pas d’injonction contraire de la Confédération, estime le chef du Département de l’économie et de la formation, Christophe Darbellay. Une semaine de transition semble suffisante, on ne peut pas maintenir un double système trop longtemps avec toutes les charges que ça implique pour les enseignants et les parents.»
«Intégrer une nouvelle organisation»
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«Notre priorité est de préserver la santé des élèves et des collaborateurs, il ne s’agit pas d’un retour à la normale», affirme de son côté la conseillère d’Etat vaudoise Cesla Amarelle. Dans son canton, particulièrement touché par la pandémie de même que Genève, la réouverture est prévue par demi-classes pour les écoliers de 1 à 8P, soit un jour sur deux, jusqu’au 25 mai au minimum. Pour les élèves de 9 à 11P, l’alternance s’étend jusqu’au 8 juin. Même timing à Genève, où la version «un groupe le matin, un autre l’après-midi» a toutefois été privilégiée. L’enseignement spécialisé, qui compose déjà avec de petits groupes, reprendra lui aussi dès le 11 mai. Les parents seront contactés par les établissements et les fratries réunies dans la mesure du possible.
«Le but de cette reprise échelonnée est de donner du temps aux maîtres pour intégrer cette nouvelle organisation, enseigner les gestes barrières, mais aussi identifier les élèves fragilisés par le semi-confinement», détaille Cesla Amarelle. A Genève, une minorité d’élèves du secondaire II, en situation de décrochage, pourront retourner en classe dès le 11 mai. La réouverture officielle n’aura a priori lieu que le 8 juin, comme dans le canton de Vaud.
Elèves vulnérables préservés
Durant toute cette période transitoire, un service d’accueil fonctionnera selon les horaires scolaires pour soulager les parents qui ne disposent pas de solution de garde. En ce qui concerne les activités extrascolaires, les cours de gymnastique et de natation restent pour l’heure interdits. Les leçons de musique peuvent en revanche reprendre avec cinq personnes maximum.
Exception notable à cette reprise romande: les élèves vulnérables ou vivant avec des personnes à risque poursuivront l’enseignement à distance, moyennant un certificat médical. Si un élève présente des symptômes, il devra impérativement se faire tester. De même, les enseignants et autres collaborateurs à risque seront autorisés à rester chez eux. Un état des lieux est en cours dans les différents cantons pour planifier les éventuels remplacements.
Pas «d’école à la carte»
Quid des parents qui refuseraient d’envoyer leurs enfants à l’école par crainte d’une contamination? «Il ne s’agit pas d’instaurer une école à la carte, prévient Anne Emery-Torracinta, cheffe de l’école genevoise. Il faut désormais apprendre à vivre avec le virus. Sauf en cas de risques sanitaires majeurs, on ne peut pas imaginer qu’un élève manque les cours indéfiniment, au risque de péjorer son avenir.»
Il ne s’agit pas d’instaurer une école à la carte. Il faut désormais apprendre à vivre avec le virus
Si les enfants sont considérés comme peu porteurs ou vecteurs du Covid-19, des règles d’hygiène strictes ont néanmoins été définies par la Confédération. Avec l’aide des communes, compétentes pour le nettoyage des bâtiments, les cantons s’attellent donc à édicter des protocoles sanitaires plus ou moins détaillés comprenant outre le lavage de mains et la distance sociale entre adultes et entre adultes et enfants: désinfection des classes et des surfaces, gels hydroalcooliques pour les écoles qui manquent de lavabos, panneaux en plexiglas devant les secrétariats ou encore traçage au sol pour réguler les entrées et sorties. Certains réflexes devront également être abandonnés: interdiction aux parents de se rassembler aux abords des écoles, plus de self-service à la cantine ou encore distribution des feuilles d’exercices par les élèves et non plus par un enseignant. Les masques ne sont en revanche pas recommandés.
Evaluation des élèves
En ce qui concerne les modalités de promotion, aucune évaluation notée n’aura lieu dans les cantons de Genève, de Vaud, du Valais et du Jura, afin de garantir l’équité entre les élèves. Entre la moyenne obtenue à la fin du premier semestre et celle au 13 mars, la situation la plus favorable sera retenue pour un passage de l’élève au degré supérieur. Les cas limites seront étudiés individuellement. A Neuchâtel, seules les compétences qui auront pu être durablement approfondies seront évaluées. De même, les notes ne seront comptabilisées «que si elles améliorent les résultats des élèves». En ce qui concerne les examens écrits de maturité, seul Fribourg a décidé de les maintenir.