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Suisse-Union européenne: la douche froide

Les Vingt-Huit n’entendent faire aucune concession à la Suisse. Mais les pourparlers se poursuivront

une rencontre cordiale, mais des positions trop éloignées sur la libre circulation. — © Reuters
une rencontre cordiale, mais des positions trop éloignées sur la libre circulation. — © Reuters

Suisse-Union européenne: la douche froide

Libre circulation Simonetta Sommaruga a rencontré Jean-Claude Juncker à Bruxelles

Les Vingt-Huit n’entendent faire aucune concession à la Suisse après le vote du 9 février

«Nos positions sont encore trop éloignées et je ne vois guère de marge de manœuvre. Par ailleurs, je ne suis pas outre mesure optimiste pour trouver un terrain d’entente.» C’est dans ces termes sans équivoque que le président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker, a expliqué qu’il était hors de question de renégocier l’accord bilatéral Suisse-Union européenne (UE) sur la libre circulation des personnes signé en 1999.

C’était lundi après-midi lors d’un point de presse à l’issue d’une rencontre avec la présidente de la Confédération, Simonetta Sommaruga, venue à Bruxelles pour exposer la difficile position de la Suisse après le 9 février 2014. Le souverain avait alors accepté l’initiative populaire de l’UDC «Contre l’immigration de masse» prônant la fin de la libre circulation des personnes et l’instauration du principe de la préférence nationale lors des recrutements en Suisse. Bruxelles avait d’ores et déjà averti que l’initiative n’était pas compatible avec le principe de la libre circulation. Dans la foulée, elle avait suspendu plusieurs programmes de coopération avec la Suisse et gelé certaines négociations. La visite de Simonetta Sommaruga a eu lieu à dix jours de la présentation du projet de mise en œuvre de l’amendement constitutionnel.

Il y a d’abord eu les formules de politesse. «La Suisse est un pays ami que je connais personnellement et dont je comprends les spécificités, a dit Jean-Claude Juncker. C’est un partenaire stratégique qui joue un rôle important au milieu du continent européen.» Et de passer ensuite dans le vif du sujet: «Le rapprochement n’est pas possible à ce stade.» Il a toutefois annoncé que les discussions se poursuivront sur une base régulière et au niveau politique. Le président de la Commission n’a pas fixé d’échéance alors même que l’article constitutionnel suisse doit entrer en vigueur en février 2017. De la même façon, il a refusé de commenter toute proposition, comme une clause de sauvegarde, faite en Suisse pour adapter l’accord sur la libre circulation aux exigences de l’initiative populaire.

Ce n’était pas un grand jour pour Simonetta Sommaruga, dont la visite est la première pour une présidente de la Confédération depuis 2012. «Je savais que la mission était difficile, mais il fallait tout de même éclaircir nos positions respectives», a-t-elle déclaré. Pour elle, la rencontre avec Jean-Claude Juncker n’était toutefois pas complètement négative. «Parce que, a-t-elle dit, des consultations se poursuivront, que Berne fera valoir son point de vue et qu’à terme, une solution est possible.»

La présidente de la Confédération a également tenu à rappeler que les relations entre la Suisse et l’Union européenne sont anciennes et importantes. «Pas moins de 1,2 million d’Européens habitent dans notre pays et 300 000 frontaliers européens viennent quotidiennement pour y travailler», a-t-elle dit. Outre Jean-Claude Juncker, Simonetta Sommaruga s’est également entretenue avec Donald Tusk, le président du Conseil européen, et Martin Schulz, président du Parlement.

Pour Jean Russotto, avocat d’affaires lausannois installé à Bruxelles et fin observateur des relations bilatérales, il n’y a pas eu de surprise dans ce dénouement. Selon lui, Simonetta Sommaruga et Jean-Claude Juncker n’ont pas vraiment détaillé les différends. «Ils ont tout de même montré que les lignes n’ont pas bougé d’un iota, fait-il remarquer. La Suisse a toutefois obtenu ce qu’elle était venue chercher: que la voie du dialogue ne soit pas fermée.»

Selon les informations de Jean Russotto, la position défendue hier par Jean-Claude Juncker est également celle des Vingt-Huit, qui n’entendent pas remettre en cause le principe de la libre circulation. A ce propos, un diplomate européen a expliqué au Temps qu’aucune concession à la Suisse n’était possible dans la mesure où Bruxelles n’arrête pas de dire non au Royaume-Uni, qui demande aussi des changements en la matière depuis plusieurs années.

«La Suisse a toutefois obtenu ce qu’elle était venue chercher: que la voie du dialogue ne soit pas fermée»