La peine maximale de privation de liberté – 20 ans – et l’expulsion pendant quinze ans du territoire suisse. C’est la peine requise par le Ministère public de la Confédération (MPC) contre Alieu Kosiah, vu la «gravité infinie» des crimes qui lui sont imputés.

C’est ainsi qu’a débuté lundi à Bellinzone la troisième et dernière semaine du premier procès en droit pénal international mené par le Tribunal pénal fédéral (TPF). En qualité d’ancien commandant du groupe armé Mouvement uni de libération pour la démocratie au Liberia (Ulimo), Alieu Kosiah est accusé d’avoir commis des crimes de guerre entre 1993 et 1995 lors du premier conflit armé civil libérien (1989-1997).

«Même si la guerre échappe à toute règle, il existe d’ultimes lignes rouges à ne pas dépasser. C’est pour les défendre que nous sommes ici aujourd’hui», a affirmé d’entrée de jeu le procureur Andreas Müller. Devant la Cour des affaires pénales, il a d’abord évoqué le cadre du conflit libérien, un conflit «hors norme» où des milliers de civils ont été tués par l’Ulimo et qui, selon de nombreux observateurs, «a dépassé toutes les guerres en termes de sauvagerie et d’horreur».

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«Image apocalyptique»

Le magistrat a ensuite longuement parcouru les 25 chefs d’accusation – incluant recrutement et utilisation d’un enfant soldat, transport forcé, pillage, traitement cruel de civils, tentative de meurtre, meurtres, profanation de cadavre et viol – pesant contre Kosiah.

Il est revenu sur l’image «apocalyptique» de Lofa (comté au nord du Liberia) occupé par l’Ulimo décrite par les plaignants. Une réalité faite de massacres, de tortures, de viols ou d’actes de cannibalisme. Des civils, sous les ordres d’Alieu Kosiah, auraient été réduits à l’esclavage pour des transports forcés de marchandises pillées – comptant même des générateurs de centrales électriques –, d'armes et de munitions, dans des conditions inhumaines.

Andreas Müller a rappelé que lors des débats précédents le prévenu avait systématiquement nié tous les crimes qui lui étaient reprochés: «Sa ligne de défense consiste à faire valoir qu’il n’était pas sur place lors de leur avènement et qu’il est victime d’une conspiration.» Le procureur s’est attelé à mettre en évidence les failles dans les déclarations du prévenu pour démontrer qu’il était bel et bien présent dans le comté de Lofa lorsque sont survenues les atrocités qui lui sont attribuées, son rôle de commande au sein de l’Ulimo et son «peu de considération pour la notion de vérité».

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Le procureur a également fait valoir une «multitude de déclarations divergentes» dans les récits des témoins appelés par la défense. Le magistrat a en revanche soutenu que les récits des plaignants convergeaient et étaient «crédibles, détaillés et constants». Il souhaite qu’ils obtiennent, «après toutes ces années», justice.
Alieu Kosiah, 45 ans, est le premier ressortissant libérien à être jugé pour des crimes de guerre présumés commis pendant la première guerre civile au Liberia. Il a été arrêté en Suisse en 2014 où il est depuis en détention.