C’est l’histoire du verre à moitié vide ou à moitié plein. Dans son rapport publié jeudi, le Groupe d’Etats contre la corruption (Greco) tance la Suisse et critique une nouvelle fois l’absence de transparence sur le financement des partis politiques. Mais en parallèle, cet organe du Conseil de l’Europe salue le renforcement des normes pénales anti-corruption: en juillet, de nouvelles dispositions sont en effet entrées en force, en particulier la suppression de la condition d’un dépôt de plainte pour engager des poursuites dans le secteur privé.

Devenu bon élève dans une matière, la Suisse reste un cancre dans la seconde. Parmi les pays membre du Conseil de l’Europe, «elle est la seule à ne pas disposer de législation sur la transparence du financement des partis», relève Sophie Meudal-Leenders, au secrétariat du Greco. Longtemps, la Suède figurait à ses côtés, mais suite aux remontrances, le pays nordique a suivi les recommandations des experts. Celles-ci prescrivent notamment de publier les comptes des partis et des campagnes, ainsi que les dons qui les financent.

Il n’y a pas de majorité politique en faveur d’une législation sur le sujet

Cette «situation extraordinaire», comme la qualifie Ernst Gnägi, responsable de l’unité du droit pénal à l’Office fédéral de la justice, n’évoluera pas dans un avenir proche: «L’avis du Conseil fédéral et de la majorité du Parlement n’ont pas changé. Il n’y a pas de majorité politique en faveur d’une législation sur le sujet; parmi les partis gouvernementaux, seul le PS y est favorable. Selon l’opinion majoritaire, imposer une réglementation nationale n’est pas compatible avec le fédéralisme; le financement des partis comme des campagnes est considéré comme relevant de la sphère privée, non de la responsabilité de l’Etat.»

Initiative populaire lancée au printemps

Pour «mettre fin à l’exception suisse», le Greco s’en remet donc à la pression des pairs, des médias, de l’opinion publique, ainsi qu’à l’initiative populaire des socialistes et des Verts, associés à des partis du centre comme le PBD. Lancée au printemps, elle obligerait les partis à communiquer à la Chancellerie leurs comptes, ainsi que les dons supérieurs à 10 000 francs par personne et par an; des obligations similaires seraient édictées pour les campagnes d’un budget supérieur à 100 000 francs. Les dons anonymes seraient interdits. Le tout serait rendu public.

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