En Suisse romande, l’initiative «No Billag», qui réclame l’abolition d’une redevance radio-TV, fait presque l’unanimité contre elle. Une «association contre la disparition des radios et TV» s’est créée le 5 octobre dernier, réunissant de nombreuses personnalités – de la politique surtout, mais aussi du sport et de la culture, comme le président de Paléo, Daniel Rossellat, le réalisateur Frédéric Gonseth et le directeur du Tour de Romandie, Richard Chassot.

Concrètement, pas moins de 19 chaînes de radios et de TV sont menacées en Suisse romande. La RTS est visée en premier lieu, mais aussi les stations des régions en mains privées, pour lesquelles la redevance représente entre 30 et 75% du budget.

Une perte d’indépendance

Parmi les politiciens, Adèle Thorens (Verte/VD) insiste sur l’indépendance des médias, qui serait affaiblie par l’initiative. Son texte stipule que la Confédération mettra régulièrement des concessions de radio et de télévision aux enchères. «Or, celles-ci seront achetées par ceux qui en auront les moyens, et l’expérience alémanique montre que ce ne sont en général pas des philanthropes.» Une allusion à peine voilée au patriarche de l’UDC, Christoph Blocher, qui ne cesse d’élargir son empire médiatique: en terre grisonne, il vient de pactiser avec le patron de Somedia, Hanspeter Lebrument, autrefois son ennemi juré.

Pour sa part, Hugues Hiltpold (PLR/GE) souligne que les milieux économiques rejettent aussi, pour la plupart d’entre eux, l’initiative «No Billag», à commencer par l’association faîtière, economiesuisse, et le Centre patronal. Reste l’USAM, qui a dit oui malgré l’opposition des Romands. «L’USAM se trompe de combat», affirme Hugues Hiltpold: 75% des PME ne paient pas de redevance du tout, tandis que 9% paieront moins qu’avant.

Tour de Romandie menacé

Dans le monde du sport, Richard Chassot décrit la spirale infernale dans laquelle on risque d’entrer: «Plus de redevance, plus de médias, plus de visibilité pour les sponsors, plus de Tour de Romandie. A terme, c’est le sport et tous ses centres de formation qui sont menacés de mort.»

Un bémol dans cette presque unanimité contre l’initiative en Suisse romande: aucune figure de l’UDC n’a souhaité participer à cette association, bien que certains élus agrariens aient voté non au Conseil national. Laurent Wehrli (PLR/VD) a certes tenté de convaincre l’un ou l’autre de ses collègues, comme Jean-Pierre Grin (UDC/VD), lequel a pourtant décliné l’invitation. «Je suis contre l’initiative, mais je ne ferai pas campagne par loyauté envers mon parti national», déclare-t-il au Temps.

Un gros travail de conviction attend la jeune association, car les gens ignorent encore le texte de l’initiative et ses conséquences sur le paysage médiatique. Jacques-André Maire (PS/NE) le reconnaît: «Au premier abord, les gens saluent parfois le fait qu’ils ne devront plus s’acquitter des 365 francs de la future redevance annuelle. Mais ils n’ont pas encore réalisé qu’ils paieront beaucoup plus cher pour leurs programmes préférés et qu’ils perdront tous les médias audiovisuels de proximité.»