Genève se souviendra de cette Fête de l’Escalade placée sous le signe de la menace terroriste. Le grand cortège de dimanche, maintenu malgré l’état de vigilance accrue décrété depuis quatre jours, était encadré par un important dispositif policier.

La population, priée de se plier aux vérifications et de ne pas paniquer au moindre tir de canon ou de mousquet accompagnant ce retour à l’an 1602, n’a pas boudé l’événement. La foule n'a pas semblé moins nombreuse que d’habitude même si certains établissements de la Vieille-Ville ont signalé l’annulation de tables.

Vigilance accrue maintenue

La fête est finie mais Noël approche et la crainte d’un attentat, communiquée par le renseignement américain avec la photo de quatre suspects liés à l’Etat islamique, n’a pas disparu. Pour le moment, le niveau d’alerte reste donc celui de la «menace précise», qui n’est pas encore celui de «la menace imminente» ou de la catastrophe majeure. Le canton dispose de cinq niveaux de vigilance différents mais sans numérotation chiffrée, précise Silvain Guillaume-Gentil, le porte-parole de la police genevoise.

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Cette menace, concentrée sur Genève sans que la cible soit identifiée, a amené la police à se déployer en grand nombre, à adapter son armement, à multiplier les contrôles, à recueillir le maximum d’informations, à vérifier tous les renseignements fournis à la centrale par des particuliers et à perquisitionner afin d’arrêter les hommes recherchés.

Signalements en série

Un contexte propice à toutes sortes d’interpellations qui ne sont pas forcément en lien avec l’inquiétant quatuor, a souligné le procureur général Olivier Jornot lors d’une conférence de presse organisée samedi pour faire le point procédural de cette agitation. Non sans lancer un appel à la raison. «A chaque fois qu’on appréhende quelqu’un, cela ne veut pas dire qu’on a mis la main sur un terroriste. Il ne faut pas confondre des contrôles ordinaires avec des événements extraordinaires».

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Le premier à tomber jeudi soir dans les mailles de ce filet très resserré est un ressortissant suisse, adepte du survivalisme et de l’histoire nazie, qui possédait un drapeau du Troisième Reich et surtout un arsenal invraisemblable à son domicile pour faire face à un hypothétique ennemi. Mitrailleuse, fusils de guerre, pistolets, mousquetons. Rien à voir avec le djihad. C’est Genève qui continuera à enquêter sur ce fou des armes signalé par une personne enfin inquiète.

Un cas plus explosif

Plus sensible dans le contexte du radicalisme islamique, Olivier Jornot a confirmé l’arrestation vendredi de deux ressortissants syriens dont le véhicule a servi à transporter des explosifs. D’un type qu’on n’utilise pas pour «creuser des carrières», a précisé le magistrat. Ces traces d’explosifs sont, pour l’instant, le seul élément à charge contre les deux hommes qui ne parlent pas français, disent être tout juste arrivés en Suisse et affirment avoir acquis la voiture très récemment.

Selon le Matin Dimanche, les deux Syriens ont attiré l’attention sur eux, route de Thonon, en raison d’un pneu crevé. Leur véhicule est immatriculée en Vendée. Ils ont passé la nuit dans un petit hôtel de l’autre côté de la frontière avant de se diriger vers le centre de Genève. Une fois les suspects soumis à un contrôle poussé côté suisse, en raison surtout de leur nationalité, l’établissement fera très vite l’objet d’une fouille en règle de la police française.

Syriens remis au MPC

Les prévenus ont été placés en détention afin d’être remis au Ministère public de la Confédération (MPC), qui est «informé minute par minute de notre travail» assure Olivier Jornot. Le duo syrien, qui n’aurait pas de rapport connu avec les quatre suspects initiaux de la photo, fait l’objet d’une procédure distincte destinée à investiguer ses liens avec l’Etat islamique et son implication dans les traces incriminantes.

«Le fait qu’ils conduisaient ce véhicule ne veut pas encore dire que ce sont eux qui ont transporté les explosifs», a nuancé le procureur général genevois avant de passer son dossier à Berne. Rien ne sera simple à démêler dans ce contexte de grande tension.