L’UDC face à des vents contraires

L’UDC restera le premier parti selon sa force électorale au Conseil national, mais elle va reculer. Le dernier baromètre lui accorde 26,5% des suffrages, soit 2,9 points de moins qu’en 2015, avec à la clé une perte de sièges (elle en compte 74, affiliés inclus). Son dernier succès significatif remonte à la législature précédente: c’était l’initiative sur l’immigration en février 2014. Entre 2016 et 2019, le parti a enchaîné les déconvenues (mise en œuvre du renvoi des criminels étrangers, naturalisations facilitées, stratégie énergétique, autodétermination, loi sur les armes).

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Et le climat politique ne lui est pas favorable. Des grands thèmes du moment, seules les relations Suisse-Union européenne font partie de son fonds de commerce. Mais son initiative populaire pour l’abrogation de la libre circulation des personnes la marginalise. «L’UDC est plus isolée qu’en 2015», constate le leader d’un autre parti.

L’UDC déploie de gros efforts pour tenter de ramener la question de la migration au centre du débat. A contre-courant, son récent tout-ménage dénonce l’«hystérie climatique» ambiante. Il souligne que la part de la Suisse à la pollution mondiale reste marginale par rapport à celles des Etats-Unis, de la Chine ou de l’Inde. Et il rend l’«immigration constante et massive» (co)responsable de la détérioration de l’environnement. Mais ce sera difficile.

«Chacun thématise le sujet du climat à sa manière. En Suisse, la charge qui pèse sur notre environnement et nos ressources est liée à plusieurs facteurs, dont l’immigration», argumente la vice-présidente Céline Amaudruz. L’UDC a-t-elle des réponses à ce défi? «Oui. L’UDC doit être reconnue pour sa politique environnementale conservatrice, qui privilégie la consommation locale, la défiscalisation des déplacements en transports publics et la préservation du paysage.»

L’UDC traverse par ailleurs une crise de succession. Elle repose sur les épaules de plusieurs personnes, mais aucune n’a l’envergure du patriarche Christoph Blocher. (B. W.)

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Notre infographie: les tendances des partis


Le PS se maintient

En 2015, la gauche accusait le choc du fameux «Rechtsrutsch» – le glissement à droite du parlement. Quatre ans plus tard, le chef du groupe socialiste sous la Coupole, Roger Nordmann, se réjouit du «maigre bilan» de ses adversaires politiques. Si ces derniers ont pu être freinés, dit-il, «c'est notamment grâce aux efforts et aux menaces référendaires du PS». Quatre mois avant les élections fédérales, le parti est annoncé en (très) légère progression (+0.3%).

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Les socialistes ont cependant des ambitions plus grandes que simplement faire barrage aux autres. Ils veulent conquérir. En première ligne du combat contre les inégalités, ils ont avancé leurs pions lors de la dernière législature. En lançant une initiative pour un congé paternité de 20 jours, en revendiquant - avec succès - la criminalisation de l'homophobie (bien que le référendum sur ce sujet ait abouti) et en se positionnent très tôt en faveur de la grève des femmes - dont le succès s'est avéré phénoménal.

Bien que proche des Verts sur la question environnementale, le PS a toutefois moins bien réussi qu'eux à s'approprier la colère climatique, se voyant même reprocher une certaine discrétion en la matière. «Nous sommes le premier parti écologiste de Suisse», s'est défendu son président, Christian Levrat, rappelant que le PS avait soutenu la sortie de l’atome avant les Verts. Pour montrer leur bonne foi, les socialistes soutiennent désormais la création d'une sorte de Plan Marshall écologique à 12 milliards de francs.

Adepte des positions tranchées, le parti à la rose est mis en difficulté par le dossier européen. Les europhiles sont tiraillés entre un rapprochement avec Bruxelles et la protection des salaires des travailleurs suisses, l'un des ses principaux fonds de commerce. Pour sortir de l'ornière, le PS compte beaucoup sur Pierre-Yves Maillard, son champion vaudois, récemment élu à la tête de l'Union syndicale suisse. (B. B.)


Le PLR pris dans le Röstigraben

Jusqu’au dernier baromètre électoral, le PLR était annoncé parmi les gagnants des élections fédérales. Une progression de plus de 1% lui était promise. Puis est venu le débat sur le climat, qui a poussé la présidente Petra Gössi à organiser une consultation interne dans le but de rédiger un «papier de position» sur le sujet. Cela a donné le sentiment que le PLR, accusé d’avoir contribué à l’échec de la loi sur le CO2 en décembre, réagissait dans l’urgence afin de montrer qu’il se préoccupait de cette thématique. «Les débats sur le positionnement du parti en matière de politique climatique ont eu un impact négatif», constate cet indicateur électoral. Celui-ci annonce un recul de 0,2 point à 16,2% sur le plan national. Mais l’image est moins négative en Suisse romande, où le PLR reste la première force politique, avec 24,1% des suffrages (+1,6%).

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La discussion interne autour du climat a été vive jusqu’au bout. Plusieurs membres ont rappelé que le PLR était avant tout le parti de l’économie et qu’il devait renoncer à toute mesure qui pénaliserait les PME et l’industrie suisses. «Nos thèmes phares restent l’économie, qui ne doit pas devenir une économie de frugalité, la solidité des assurances sociales et le maintien de bonnes relations entre la Suisse et l’Union européenne. Mais nous ne pouvons pas ne pas nous positionner sur l’environnement et le climat, la troisième préoccupation des Suisses», justifie le vice-président Philippe Nantermod.

Il explique ainsi les différences entre la Suisse alémanique et la Suisse romande: «Nos positions sur l’environnement sont plus proches de celles, plus décontractées, des Romands.» Sur le plan national, la majorité absolue que le PLR a détenue avec l’UDC durant la législature a été observée avec un regard critique. Chef du groupe socialiste, Roger Nordmann attribue à l’alliance PLR-UDC les échecs de la troisième réforme de l’imposition des entreprises (RIE III), de la Prévoyance vieillesse 2020 et du contrôle de l’ouverture de cabinets médicaux. (B. W.)


Pour le PDC, l'interminable spirale négative

C’est une menace que le PDC ne doit pas prendre à la légère. Au soir du 20 octobre, il pourrait ne plus appartenir au quarté de partis siégeant au Conseil fédéral. Dans le dernier baromètre de la SSR, il est talonné par les Verts, même si ceux-ci ne pourront guère s'emparer du siège PDC dans l'immédiat.

En avril dernier, le PDC engrangeait pourtant un succès retentissant au Tribunal fédéral, qui pour la première fois de l’histoire a invalidé la votation – que le parti orange avait perdue de justesse en 2016 – relative à son initiative pour mettre fin à la pénalité fiscale du mariage. Mais il s’agissait là d’une victoire à la Pyrrhus dans la mesure où il apparaît exclu de revoter sur le même texte, qui définissait le mariage comme l’union entre un homme et une femme.

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Même lorsqu’il gagne, le PDC n’arrive pas à en tirer un vrai profit politique. Nul autre parti que lui n’a autant souffert de la polarisation de la politique fédérale. Certes, il est toujours celui qui assume au mieux ses responsabilités gouvernementales. Mais les électeurs ne lui sont pas reconnaissants de jouer ce rôle de bâtisseur de ponts.

En cette législature, le PDC a permis de mettre sous toit la transition énergétique sous l’impulsion de la populaire Doris Leuthard. Pour le reste, ses prises de position restent largement méconnues du grand public. En matière de politique climatique, il passe inaperçu, le devant de la scène étant accaparé par les Verts et les Vert’libéraux. Et concernant l’accord-cadre avec l’UE, il ne sort pas du lot non plus. Il prononce un «oui» de principe, cependant largement écorné par de nombreuses réserves.

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Finalement, c’est presque uniquement en matière de politique de la santé que le PDC a gagné en visibilité durant ces quatre dernières années. Alarmé par la hausse continuelle des coûts de la santé, il a lancé une initiative pour instaurer un mécanisme de plafond aux dépenses sur le modèle du frein à l’endettement. (M. G.)


Les Verts bourgeonnent

Ils sont annoncés gagnants depuis des mois. En 2015, ils avaient remporté 7,1% des suffrages. Quatre ans plus tard, le baromètre électoral les crédite de plus de 10% des intentions de vote.

Cette progression des Verts ne surprend pas, tant la question climatique a agité l’année en cours. Au niveau mondial, sous l’impulsion d’une collégienne suédoise nommée Greta Thunberg. Et au niveau suisse, où des centaines de milliers de personnes sont descendues dans la rue entre mars et avril.

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Guidées par l’adolescente nordique, déçues par les promesses non tenues de l’Accord de Paris sur le climat de 2015, excédées par le torpillage des partis bourgeois de la révision de la loi sur le CO2, les foules ont soulevé la Suisse en début d’année – et propulsé les Verts sur le devant de la scène. Le climat est désormais perçu comme l’un des trois principaux défis que doit relever le monde politique suisse. Et les Verts en profitent au maximum.

Particulièrement attentifs à l’égalité hommes-femmes, les écologistes profitent également de la vague féministe. Quel que soit son succès en octobre, le parti devrait toutefois rester la cinquième force politique du pays. (B. B.)

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Au PBD, une stratégie défensive

L’objectif du Parti bourgeois-démocratique (PBD) est de se maintenir. Son président, Martin Landolt (GL), reconnaît que sa jeune formation a beaucoup perdu en visibilité depuis le départ de la conseillère fédérale Eveline Widmer-Schlumpf en 2015. «Et la constellation politique de la législature 2015-2019 ne nous a pas été favorable. Le centre droit, qui n’a pas été créatif, n’a plus eu besoin de nous pour former des majorités. Or, il est important dans notre système que les majorités varient selon les sujets et que les petits partis puissent jouer un rôle décisif», analyse-t-il.

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S’il présente des listes dans le canton de Vaud, à Fribourg et à Genève, le PBD concentrera sa stratégie sur la Suisse alémanique, surtout là où il est représenté au gouvernement (Berne, Grisons, Glaris). Les sondages ne laissent guère miroiter de perspectives de croissance. Le parti du «juste milieu» – c’est son slogan de campagne – a sept représentants au Conseil national et un aux Etats. Ce dernier fauteuil devrait être repris par la conseillère d’Etat bernoise Beatrice Simon, la nouvelle star du PBD. L’égalité, le tournant énergétique et la défense de l’environnement sont au programme, mais la concurrence est rude sur ces sujets phares. (B. W.)


Pour les Vert'libéraux, le bonus de la crise climatique

Les Vert’libéraux semblent promis à une progression d’environ 2% environ cette année. Après avoir subi une gifle mémorable en 2015 lorsque leur initiative pour une taxe sur l’énergie avait été repoussée à 92% par le peuple, ils ont simplifié leur message.

En matière de politique climatique, ils le résument en deux phrases. D’une part, ils sont convaincus que les intérêts de l’économie et de l’écologie sont conciliables. D’autre part, ils prônent des taxes incitatives plutôt que les mesures contraignantes soutenues par la gauche. Pour ce qui est du dossier européen, ils sont devenus le seul parti qui soutient sans réserve l’accord institutionnel avec l’UE, au point de séduire certains europhiles déçus du PS.

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Autant dire que la gauche s’en méfie plus que jamais. Elle les a surnommés «les Verts asociaux». Les Vert’libéraux assument sans broncher: «Nous sommes un parti de droite pour laquelle l’économie – et non l’Etat – fait la prospérité du pays. Sans elle, il n’y a pas de politique sociale ni environnementale», souligne la conseillère nationale vaudoise Isabelle Chevalley. (M. G.)