C’est du jamais-vu. La répartition des forces politiques au sein du Grand Conseil valaisan pourrait changer en pleine législature. L’impact des fraudes survenues dans la partie germanophone du canton lors de l’élection de mars 2017 ne fait plus de doute. L’UDC du Haut-Valais en a profité pour obtenir un siège supplémentaire sur les 130 en jeu. Mais la manière de corriger ces résultats falsifiés fait débat.

«L’UDC ne veut pas d’un siège qui ne lui appartient pas», assure d’emblée Michael Graber, chef de groupe des agrariens du Haut-Valais au Grand Conseil. Toutes les forces politiques s’accordent sur le fait que, grâce aux agissements d’un trentenaire – membre de l’UDC haut-valaisanne au moment des faits – qui aurait falsifié près de 200 bulletins de vote, le parti agrarien a obtenu ce siège supplémentaire dans l’arrondissement de Brigue au détriment du CSPO. Toutes conviennent également que les chrétiens-sociaux du Haut-Valais doivent le récupérer et chaque parti y va de sa proposition.

Accord tacite proposé par l’UDC

Pour tenter de réparer les pots cassés, les agrariens sont prêts à signer un accord de principe. Michael Graber a annoncé fin juin dans les colonnes du Walliser Bote que sa formation consentait à céder un siège au CSPO. Mais la double proportionnelle, le système électoral utilisé pour la première fois lors de l’élection, complique la manœuvre.

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Si les résultats sont clairs sur l’ensemble de l’arrondissement, ils diffèrent dans les districts, qui font office de sous-arrondissements. L’UDC devrait ainsi céder un siège au PDC dans le district de Brigue et ce dernier devrait en faire de même avec le CSPO dans le district de Rarogne oriental. Deux députés – un UDC et un PDC – devraient ainsi démissionner, tous les viennent-ensuite des listes concernées ainsi que les suppléants devraient refuser le poste et les parrains des listes pourraient ainsi nommer des représentants des autres partis. Pour Michael Graber, il s’agit de la solution «la plus rapide, la meilleur marché et la plus correcte». Mais elle dépend du bon vouloir de tous les partis concernés. Et l’UDC est bien seule à trouver cette solution satisfaisante.

Le PDC en faveur d’une nouvelle élection

Ni le CSPO ni les démocrates-chrétiens ne veulent de cet accord. «Les analyses que nous avons réalisées démontrent que c’est impossible de le faire», explique simplement Philipp Matthias Bregy. Le chef de groupe du PDC haut-valaisan se dit toutefois ouvert à cette solution si le Conseil d’Etat la juge juridiquement acceptable. Mais pour les démocrates-chrétiens, étant donné les informations actuellement en leur possession, seule une nouvelle élection pourrait régler le litige. Et c’est à leur tour de se retrouver isolés.

Le CSPO veut un recomptage

Pour Michael Graber, il n’existe aucune base légale pour organiser une nouvelle élection. Idem pour la solution prônée par le CSPO, à savoir un recomptage des voix en ne tenant pas compte des 150 bulletins identifiés comme frauduleux par le Ministère public. Les chrétiens-sociaux estiment en effet qu’au vu des nouveaux éléments à disposition, notamment l’ampleur de la fraude, une révision du vote est possible, et ce malgré la validation par le Grand Conseil lui-même des résultats de mars 2017. «Il s’agit du meilleur moyen pour respecter la volonté du peuple», assure leur chef de groupe, Diego Clausen. «Comment identifier les bulletins frauduleux pour être sûr de ne pas les prendre en compte lors du recomptage?» lui rétorquent l’UDC et le PDC.

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Tous les partis concernés sont donc d’accord sur la finalité, d’autant plus que le «transfert» d’un siège UDC vers le CSPO ne modifierait en rien le rapport de force au sein du parlement. Mais leurs avis divergent sur le chemin à emprunter pour y arriver. La solution pourrait venir de la Commission de justice du Grand Conseil. Elle doit statuer sur une requête du CSPO déposée en juin 2017, qui demande la révision du vote. Sa présidente, Madeline Heiniger, espère que la commission pourra rendre son rapport avant la fin de l’année. Elle précise toutefois que le dossier est délicat, car «si l’aspect juridique est important, il y a également un côté émotionnel à gérer».