L’avenir de Veysonnaz se fera-t-il main dans la main avec Sion? L’union des deux communes pourrait être actée le 18 juin prochain et prendre effet 18 mois plus tard, le 1er janvier 2025, si leurs citoyens se prononcent en faveur d’une fusion. Et, effet collatéral de cette décision, Veysonnaz deviendrait une exception: une station dans laquelle il serait possible de construire des résidences secondaires.

Village de montagne, principalement axé autour du tourisme et du ski en particulier, Veysonnaz compte aujourd’hui 70,5% de résidences secondaires sur son territoire de 1,17 kilomètre carré. Autant dire qu’en l’état actuel, en raison de la législation empêchant la construction de telles habitations si leur seuil dépasse 20% du bâti d’une commune – plus connue sous le nom de Lex Weber –, il est inenvisageable qu’une construction de ce type puisse voir le jour dans la station, et ce même à long voire très long terme. Mais en cas de fusion avec Sion, la donne changerait. Drastiquement. Le taux de résidences secondaires de la nouvelle commune serait de 9,3% (contre 7,8% actuellement pour Sion).

L’entité fusionnée ne ferait ainsi plus partie des quelque 339 communes du pays (qui en compte 2136 au 1er janvier 2023) au taux de résidences secondaires dépassant les 20%. Et ce malgré son emplacement au cœur de l’arc alpin. Car la carte de la Confédération dédiée à cette thématique dévoile un pays divisé en deux: au nord les communes n’ayant pas atteint la limite inscrite dans la loi et pouvant ainsi continuer de bâtir des résidences secondaires, et au sud, dans les Alpes et les Préalpes, la très grande majorité de celles ayant dépassé le seuil légal et se voyant interdire d’en construire.

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Le président de Sion se veut rassurant

Si on imagine volontiers certains promoteurs se frotter les mains, nombreux sont les habitants à redouter un boom de la construction ou la vente de résidences principales entraînant l’abandon de lits chauds au profit d’habitations utilisées uniquement quelques semaines dans l’année. Face à ces craintes qui pourraient devenir réalité en cas de fusion, Philippe Varone, le président de Sion, se veut rassurant. «La volonté de la ville est claire. Dans sa planification territoriale, elle veut créer des lits chauds, développer de l’habitat et non pas forcément des résidences secondaires», appuie le libéral-radical. Et de poursuivre: «Nous allons vraiment prendre le temps de la réflexion, mais aussi modifier notre plan directeur pour confirmer cette vision mettant en avant les lits chauds.»

Sion veut créer des lits chauds, développer de l’habitat et non pas forcément des résidences secondaires

Dans les faits, les autorités de Veysonnaz vont même prendre les devants. Dans le cadre de la révision en cours du plan d’affectation des zones de la commune, elles entendent préserver la majorité de la zone à bâtir des résidences secondaires. «Comme cela était déjà le cas avant l’entrée en vigueur de la Lex Weber, acceptée par le peuple en 2012, nous souhaitons interdire la construction de telles habitations dans un périmètre élargi autour de notre village, ce qui devrait représenter environ deux tiers de la zone à bâtir», indique Patrick Lathion. Le président de Veysonnaz complète: «Le solde de la zone à bâtir, situé dans la zone touristique, sera principalement dédié à de l’hébergement touristique commercialisé, autrement dit aux lits chauds.»

Il n’en demeure pas moins que, légalement, de nouvelles résidences secondaires pourraient voir le jour à Veysonnaz. Et l’exemple n’est pas unique. L’an dernier, en fusionnant avec Les Breuleux, la commune jurassienne de La Chaux-des-Breuleux a vu son taux de résidences secondaires passer sous la barre des 20%. Idem pour celle de Hemberg dans le canton de Saint-Gall après son union avec Neckertal, ou de Bauen à Uri en 2020 après son rapprochement avec Seedorf.

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«D’autres moteurs l’emportent sur la loi sur les résidences secondaires»

Alors, la fusion de communes est-elle devenue un outil pour contourner la Lex Weber? Pas si l’on en croit l’Office fédéral du développement territorial, qui nous renvoie vers deux de ses communiqués, datant de mars 2021 et mars 2023. Le premier, revenant sur l’année 2020, relève que dans la plupart des cas de fusions concernées par la problématique, «le taux de résidences secondaires n’est pas descendu sous la barre des 20 pour cent». Et de citer l’exemple des cinq localités tessinoises devenues Verzasca ou celui de Vollèges et Bagnes, en Valais, ayant donné naissance à Val de Bagnes.

Le statu quo est donc la norme. Mais il y a aussi des exceptions inverses: des communes qui, en raison de la fusion, voient leur taux de résidences secondaires passer au-dessus du seuil de 20%. C’est le cas, par exemple, de Melano au Tessin. En liant son destin à ceux de Rovio et Maroggia afin de former Val Mara, elle a vu son taux de résidences secondaires franchir la limite légale, indiquait l’Office fédéral du développement territorial en mars dernier. A en croire la Confédération, le nombre de communes passant sous la barre des 20% en raison d’une fusion est grosso modo identique à celui des entités franchissant ce seuil en sens inverse, après une union. «On peut dire que pour les fusions de communes, d’autres moteurs, comme des structures administratives plus efficaces, la gestion de la destination, etc., l’emportent sur la loi sur les résidences secondaires», résume l’Office fédéral.