Une décision mûrement réfléchie
Personnellement, Nicolas Dubuis a aussi été passablement blâmé ces dernières années par le Grand Conseil. Au point que sa réélection au poste de procureur général par le parlement, en mai 2021, s’est déroulée à huis clos, afin de «protéger sa personnalité». L’annonce de son départ est-elle dès lors synonyme de constat d’échec? «Non, elle est le fruit d’une prise de conscience, issue d’une réflexion concernant mon avenir. Après quatorze années passées à la tête de l’institution instruction pénale, je veux une activité qui comprenne moins de travail administratif, pour me consacrer à ma passion qu’est le droit. Cela me manque dans ma fonction actuelle», répond-il, en soulignant que «plus [il] attend, moins il sera bon sur le marché du travail».
Chef du groupe du Centre du Valais romand au parlement – parti auquel appartient Nicolas Dubuis –, Vincent Roten estime que, «compte tenu des derniers rapports, nous pouvions nous attendre à un changement à la tête du Ministère public et notamment à la démission de la procureure générale adjointe, qui n’est pas une surprise», appuie-t-il.
Soulagement pour de nombreux partis
Au sein des autres formations politiques, c’est une forme de soulagement qui règne. «Nous prenons acte, avec satisfaction que les choses bougent et que les responsabilités qui devaient être prises l’ont été. Cela sera bénéfique pour l’institution, qui va retrouver de la sérénité, mais aussi pour les justiciables du canton», appuie Sonia Tauss-Cornut, la cheffe de groupe des libéraux-radicaux au parlement, un parti qui n’a jamais caché ses griefs à l’égard du Ministère public et son procureur général.
Céline Dessimoz, son homologue des Vert·e·s, souligne la capacité de Nicolas Dubuis «à se remettre en question et à prendre des décisions qu’il estime juste pour lui et pour le système». «Etant donné qu’une réorganisation se profile pour l’institution, c’est une bonne chose de partir avec un nouveau jeu de cartes», image-t-elle. Et Sarah Constantin, cheffe du groupe Parti socialiste et Gauche citoyenne, d’ajouter: «On entend enfin les critiques répétées depuis des années. On ne peut désormais que souhaiter trouver un (ou une) procureur général qui ose prendre à bras-le-corps les dossiers les plus compliqués.»
«Il faut des moyens supplémentaires»
Ces critiques, Nicolas Dubuis les connaît trop bien. Face à la presse, il les a d’ailleurs anticipées. «Mon but a toujours été d’instruire. J’aimerais le faire plus. Mais il est impossible de gérer l’institution dans son ensemble, y compris un office [En Valais, le procureur général est à la tête de l’office central, qui traite notamment les affaires les plus importantes du canton] et d’instruire en même temps», appuie-t-il.
Et de poursuivre: «Il faut des moyens supplémentaires, à l’image de greffiers ou de services généraux comprenant les ressources humaines, la logistique ou l’informatique. Cela fait des années que je le dis. Je suis heureux que cela se retrouve dans le rapport du Conseil de la magistrature et que ces améliorations soient sur la bonne voie.» On ne peut s’empêcher d’y voir une pique au Grand Conseil, qui alloue ces ressources supplémentaires, et qui n’a jamais été avare en critiques à l’égard de Nicolas Dubuis.