Le Vaudois Rodolphe-Théophile Bosshard (1889-1960), le Genevois Edmond Vallet (1876-1929) et le Valaisan Edmond Bille (1878-1959), cibles de faussaires: cela n’a rien pour étonner Bernard Wyder, historien de l’art, ex-conservateur au Musée des beaux-arts de Lausanne et auteur du catalogue raisonné des œuvres d’Edouard Vallet. Rien, sinon la présence dans ce cénacle d’Edmond Bille, moins coté sur le marché romand que les deux autres.

En ce qui concerne les cotes, qui fluctuent selon les régions du fait de «ce cloisonnement typique de la Suisse», Bosshard, dont la peinture était très prisée il y a une dizaine d’années, semble avoir perdu de son attrait, à l’instar d’un Auberjonois. Quoi qu’il en soit, des peintres doués d’un style caractéristique, et prolifiques, intéressent les faussaires. Lorsqu’il préparait le catalogue raisonné de Vallet, Bernard Wyder a été confronté à ce genre de «faux évidents», qu’il n’est point besoin d’analyse de pigments pour déceler.

L’historien de l’art reconnaît trois catégories parmi les auteurs de faux: il y a ceux qui, à partir de l’œuvre, réalisent des tableaux qui lui ressemblent plus ou moins, et les signent modestement d’initiales, par exemple, pour Vallet, E.V. Ceux qui, «plus pernicieux», partent d’une composition de groupe, avec différents personnages, s’en inspirent pour isoler une tête et imaginent une «étude pour», dûment signée.

La troisième catégorie, réservée aux «tout malins», est formée de faussaires qui savent lire entre les lignes des catalogues et sélectionnent une œuvre non retrouvée, non localisée, en adoptent le format, la technique, le sujet, et la reproduisent. A propos de ces pratiques, Bernard Wyder évoque encore les nombreux copistes en activité dans les musées, pour lesquels existent des règles: des formats différents des originaux et bien sûr pas de signature. Car même pour des faux non seulement avérés, mais attestés, il existe un public d’amateurs…