Le Turco-Suisse de 27 ans accusé d’avoir poignardé à mort, le choisissant au hasard, un Portugais de 29 ans samedi au kébab proche de la gare de Morges venait de sortir de prison. Il était surveillé pour d’éventuels liens avec le terrorisme islamiste.

Après avoir été arrêté et placé en détention provisoire en avril 2019 pour avoir commis un incendie criminel dans une station-service de Prilly, il avait été libéré en juillet 2020 sur demande du Ministère public de la Confédération (MPC), s’appuyant sur une expertise psychiatrique, indique le MPC.

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Plus dérangé que dangereux

Il avait donc été relâché pour avoir été jugé plus dérangé que dangereux. Mais jusqu’à quand un terroriste peut-il bénéficier de cette présomption de folie? «C’est toute la difficulté qu’amène l’instabilité certaine de ces individus. Où placer le curseur?» répond Jean-Paul Rouiller, responsable du Groupe d’analyse du terrorisme au Geneva Centre for Security Policy. Il semblerait qu’il dise avoir agi pour «venger le Prophète». Quel crédit accorder à ces propos? Est-ce raisonné, motivé? Selon la RTS, l’homme a aussi assuré avoir agi au nom du djihadisme, «par vengeance contre l’Etat suisse».

Un couvre-feu, une obligation de s’annoncer

A la suite de sa précédente arrestation, les enquêteurs vaudois sont tombés «sur des indices de possibles antécédents djihadistes», souligne le MPC, et ajoute que l’individu était dans le viseur du Service de renseignement de la Confédération depuis 2017, «en raison de consommation et de diffusion de propagande djihadiste». Lors de sa relaxe, le prévenu avait été suivi de mesures d’accompagnement: un couvre-feu nocturne, une obligation de s’annoncer et l’interdiction de port d’armes.

«La police municipale et le canton exécutent alors et remontent les informations au Ministère public», explique Jean-Paul Rouiller. Jusqu’à l’homicide du 12 septembre, le Ministère public dit n’avoir été informé d’aucune violation des mesures imposées qui aurait justifié une nouvelle remise en détention. L’enquête dira si les signaux qui lui ont été envoyés ont reçu les réponses attendues.

Six cents personnes «potentiellement dangereuses»

Aurait-on dû davantage le surveiller? «Surveiller des gens demande beaucoup de ressources. On liste 600 personnes «potentiellement dangereuses» en Suisse, en réalité on doit tourner autour de 1000. Quels critères déterminent la priorité de ces surveillances? Par mesure de substitution, le Service de renseignement de la Confédération ne peut être sur un cas que gère le Ministère public», explique encore l’expert en terrorisme.

L’attaque a eu lieu samedi soir peu après 21h. La victime, décédée sur place, se trouvait avec sa compagne lorsque l’assaillant leur a foncé dessus avec un couteau. Après une nuit de cavale, l’agresseur a été arrêté dimanche à Renens par la police vaudoise. A Morges, lundi soir, une centaine de personnes ont rendu hommage à la victime sur les lieux du drame.