Vaud
A défaut d’une grande alliance de droite, la Vert’libérale Isabelle Chevalley a renoncé à se présenter au Conseil d’Etat vaudois. Elle pourrait néanmoins réapparaître dans l’entre-deux tour électoral

Seule, elle ne se lance pas. Trop risqué, au vu du poids électoral de son parti, les Vert’libéraux vaudois. Au moment où le PLR annonçait son alliance exclusive avec l’UDC dans la course au Conseil d’Etat, Isabelle Chevalley retirait sa candidature. Depuis, elle est cheffe de campagne de François Pointet, candidat alibi qui profitera de la tribune pour entrer au Grand Conseil. Pourtant, Isabelle Chevalley, conseillère nationale depuis 2011, détient la notoriété qu’il manque à Jacques Nicolet, le candidat sélectionné par l’UDC. Un conseiller d’Etat lui aurait glissé que, selon lui, si elle s’était trouvée sur la liste de droite, elle serait passée au premier tour avec les trois sortants PLR, faisant revenir la majorité au camp bourgeois.
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«C’est un mauvais calcul mathématique de la part des PLR: Jacques Nicolet n’apporte pas suffisamment de voix hors de son parti», n’hésite pas à trancher Isabelle Chevalley. «Typiquement, au dernier vote sur la stratégie énergétique, alors que ses collègues Alice Glauser et Jean-Pierre Grin ont défié leur parti en votant pour, lui, s’est abstenu. L’UDC vaudoise joue sur deux tableaux en mettant en avant un agriculteur de la ligne Mermoud mais en n’osant se distancier de l’UDC nationale».
La voie de l’avenir
L’Ecologiste de droite croit en son parti et en parle «non comme une mode, mais comme l’avenir». Ancienne députée du parti libéral, elle s’était fait exclure de son groupe politique en 2007, après avoir lancé la bannière Ecologie libérale. Elle constate que dans la distribution actuelle, il faut être de gauche ou de droite pour compter, ou faire partie d’une alliance, «la faute aux quorums qui profitent aux grands partis». Elle ajoute que «la seule chance de vraiment exister est de se trouver dans un exécutif».
Unique élue Vert’libérale vaudoise sous la coupole, la conseillère nationale de 44 ans fait figure de soliste sans renforts. Elle mène ses dossiers en faisant cavalier seul, sachant, comme tout bon centriste, façonner des majorités. Ses collègues la trouvent entêtée, obstinée, mais fidèle à ses convictions. Fondatrice du groupe interparlementaire Suisse-Afrique, elle s’active dans de nombreux projets humanitaires sur le continent africain.
«Un cerveau contre un pantin»
À droite, comme à gauche, elle n’a pas que des soutiens. On lui reproche de se focaliser uniquement sur ses intérêts (OGM, défense des animaux), au détriment de son travail en commission. Mais, généralement, on la sent capable d’endosser le rôle d’une conseillère d’Etat. Certains à droite la verraient remplacer avantageusement l’écologiste sortante Béatrice Métraux. Pour la gauche, elle vaudra toujours mieux qu’un élu UDC.
Isabelle Chevalley se veut réaliste: «avec ou sans moi, mon parti n’a pratiquement pas de chance de remporter un siège au Conseil d’Etat hors alliance. Notre campagne se concentre sur les huit sièges que nous visons au Parlement, contre six aujourd’hui».
Pour connaître le poids des Verts’libéraux dans le canton, référons-nous aux résultats des dernières élections fédérales, en 2015. Les Vaudois leur donnaient 3,89% de leurs voix. Réélue pour un second mandat, Isabelle Chevalley récoltait 2600 voix sur les bulletins PLR modifiés alors que Jacques Nicolet n’en faisait que 1020.
Une alliance plus faible et plus risquée
Peut-on en déduire que deux fois plus d’électeurs PLR souhaiteraient voir, cette fois-ci, le nom de la Vert’libérale sur leur ticket de droite, plutôt que celui du paysan UDC? «Non, notre partenaire historique reste l’UDC», affirme le président du PLR Vaud, Frédéric Borloz. «La vraie alliance, profitable pour le centre-droite aurait bien sûr été le ticket large à cinq, avec les Vert’libéraux, mais l’UDC n’en voulait pas. Notre chance de renverser la majorité de gauche au Conseil d’Etat a malheureusement chuté de moitié sans les Vert’libéraux», regrette-t-il.
En renonçant à se lancer dans la course au Conseil d’Etat, pour faire face à ce chœur d’hommes sans soliste qu’est l’UDC, Isabelle Chevalley a-t-elle finalement manqué de cran? «Au contraire, le courage, c’est de se retirer», répond l’intéressée. «Est-ce que cela signifie pour autant mettre une croix sur le conseil d’Etat? Pas forcément». Un revirement de situation dans l’entre-deux-tours, si Jacques Nicolet fait un très mauvais score le 30 avril, n’est pas exclu. Ni pour la candidate, ni pour le président du PLR Vaud, Frédéric Borloz. La dernière de ces situations remonte en 1981, lorsque le syndic radical de Lausanne Jean-Pascal Delamuraz sauvait le siège de son parti en se présentant au château cantonal. Il n’y était resté que deux ans avant d’être élu au Conseil fédéral.