A l’étroit sur le campus de Dorigny et dans les bâtiments proches du CHUV, les étudiants et les chercheurs en sciences de la vie disposeront, à l’horizon 2023, d’un nouveau bâtiment dans le quartier scientifique de l’Université de Lausanne (Unil), à la lisière de l’EPFL. Parallélépipède rectangle lumineux d’une surface de 16 000 mètres carrés, l’ouvrage a été conçu pour s’inscrire dans l’environnement naturel du campus et «s’intégrer dans l’esprit des lieux», note le conseiller d’Etat Pascal Broulis en charge des finances et des constructions. Mardi matin, avec sa collègue Anne-Catherine Lyon, responsable de la Formation, il en a dévoilé les contours à l’annonce des résultats du concours d’architecture.

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Le jury a choisi le projet des bureaux bruxellois Baukunst et parisien Bruther, baptisé «23071933». Une suite de chiffres en guise d’hommage à l’architecte Richard Rogers, dont c’est la date de naissance; en 1971, avec Renzo Piano et Gianfranco Franchini, Richard Rogers avait gagné le concours du Centre Georges-Pompidou, à Paris, qui fête cette année ses 40 ans. L’allusion à Beaubourg se retrouve dans l’architecture de l’ouvrage. Celui-ci «représentera un véritable atout pour attirer et recruter à Lausanne des professeurs en sciences de la vie», note la rectrice Nouria Hernandez.

Une «architecture flexible et affirmée»

Le concours d’architecture pour le bâtiment des Sciences de la vie avait été lancé en mai 2016. Présidé par l’architecte cantonal Emmanuel Ventura, le jury a «été convaincu par l’architecture flexible et affirmée» du projet qui porte une grande attention à la lumière naturelle grâce à des coursives périphériques.

Situé dans le quartier de la Sorge, en face de l’Amphimax, proche de six autres bâtiments abritant les sciences exactes, naturelles, criminelles et médicales de l’Unil, le futur bâtiment comprendra deux zones distinctes: l’une sera occupée par des salles de travaux pratiques des étudiants en biologie et en chimie de l’Unil comme de l’EPFL; actuellement, ils se serrent dans des laboratoires qui doivent être rénovés. L’autre partie sera consacrée à des activités de formation avancée et de recherche: les départements des neurosciences fondamentales et de microbiologie fondamentale de la Faculté de biologie et de médecine (FBM), comprenant en tout 30 groupes de recherche et près de 250 chercheurs y seront rassemblés. S’y ajouteront des espaces communs, des auditoires, une cafétéria.

Reconfiguration du campus

Ce futur site dédié aux sciences de la vie représente l’une des pièces du puzzle qui se met en place dans le canton de Vaud pour valoriser l’enseignement, ainsi que la recherche en biologie et en médecine, en particulier en oncologie. Au fil des projets et des constructions, une nouvelle géographie du campus prend forme. Suivant cette «reconfiguration thématique», selon Anne-Catherine Lyon, l’enseignement et la recherche fondamentale en biologie tendront à être regroupés à Dorigny; la recherche dite translationnelle, qui vise à accélérer le transfert des découvertes vers la recherche clinique et les traitements destinés aux patients, sera, elle, rassemblée près du CHUV.

C’est pourquoi la neurobiologie et la microbiologie installées près de la cité hospitalière déménageront dans le bâtiment des sciences de la vie, tandis que des chercheurs de l’Unil et de l’EPFL émigreront dès 2018 dans le nouveau centre de recherche sur le cancer, en construction à deux pas du CHUV. En parallèle, deux nouveaux auditoires vont être mis en service pour la formation des médecins.

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Budget de 136 millions

Le budget global de l’ouvrage signale l’importance accordée par le canton à l’étude du vivant. Le coût est devisé à 136 millions de francs, assurés conjointement par l’Etat de Vaud pour 83 millions, par l’EPFL pour 27,5 millions et par une subvention fédérale de 25,5 millions. Le chantier pourrait démarrer dans le courant 2019 pour une mise en service échelonnée entre 2021 et 2023.

«Un projet révélateur, estime Anne-Catherine Lyon, des liens entre les deux hautes écoles pour produire le meilleur des sciences de la vie». Globalement, le département de l’EPFL axé sur les neurosciences, la biologie moléculaire et la bioingénierie occupe 800 personnes (chercheurs, y compris doctorants et collaborateurs), ainsi que 750 étudiants en bachelor et master. A l’Unil, la FBM compte 2100 étudiants sans compter ceux qui suivent leur formation clinique, auxquels s’ajoutent 930 collaborateurs (professeurs, chercheurs, etc.) en sciences de la vie.

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Un campus en croissance soutenue

Le futur bâtiment des Sciences de la vie s’ajoute à une longue liste de constructions récentes ou en cours. Depuis février 2010 et l’ouverture du Learning Center à l’EPFL, le campus lausannois vit au rythme des chantiers, et cela durera jusqu’au milieu des années 2020. L’EPFL a inauguré en novembre dernier l’ArtLab, ultime geste de Patrick Aebischer, élégant bras de bois alangui sur la grande pelouse de l’école.

L’Université n’est plus en reste. Avant les Sciences de la vie, il y aura, à la fin de cette année, le «Synathlon», édifice situé à l’entrée Est du campus, vers l’Internef (Droit et HEC). Il accueillera des fédérations sportives, afin de les rapprocher des centres d’étude sur le sport de l’Université. Au reste, celle-ci a rénové et agrandi son centre sportif.

Prochaine grande audace architecturale, en 2020: le «Vortex»: nom de projet d’un bâtiment circulaire, avec une rampe ascendante dans son cercle intérieur, qui va se construire au nord de l’Amphimax, dans la zone Sorge, et qui est dessiné par le Suisse Jean-Pierre Dürig. Vu du ciel, il sera aussi présent que le Learning Center: l’un comme un bloc d’emmental, l’autre comme un pur anneau dans les bois. Il hébergera les athlètes des Jeux olympiques de la jeunesse qui se tiendront en 2020 à Lausanne, puis sera repris pour offrir 1400 logements, dont 1200 pour les étudiants. Un changement considérable pour l’Université: un peu à l’image du Quartier Nord de l’EPFL, où se situent les logements et le Centre de congrès, il faudra aménager des espaces communs, des commerces, des restaurants…

Enfin, le bâtiment symbolique de l’Université, l’Unithèque (la «Banane»), va connaître un réaménagement moins visible à l’extérieur, mais spectaculaire en ses murs. Autant de défis pour un campus en ébullition. (Nicolas Dufour)