Le Temps: Le nombre de chômeurs en fin de droit qui passent à l’aide sociale a doublé depuis 2009. Vous soulignez pourtant souvent que le taux d’aide sociale est stable dans le canton. Comment cela s’explique-t-il?
Pierre-Yves Maillard: Pendant cette même période, nous avons massivement développé les moyens au service de l’insertion professionnelle dans le cadre de l’aide sociale. Nous avons aussi créé des dispositifs alternatifs, comme les PC familles et la rente-pont. Tout cela a permis de stabiliser le taux d’aide sociale, mais le coût de ces dispositifs s’est déplacé de l’assurance chômage vers la politique sociale cantonale, qui cumule ainsi des tâches d’assistance, d’insertion et de soutien à la formation.
Les faîtières économiques ont accueilli très froidement votre appel à créer un millier d’emplois à durée déterminée pour les chômeurs de plus de 50 ans. Y avez-vous renoncé?
Le phénomène du chômage en fin de droit n’intéresse aucun lobby économique. Les départements de l’économie, les organisations de promotion ou les associations patronales se focalisent sur la création d’emplois, puis les entreprises font leur marché dans un bassin de recrutement qui dépasse largement nos frontières. Ces milieux peuvent ainsi croire que tout va bien. Je préviens très calmement que cet aveuglement nous fera perdre la prochaine votation sur la libre circulation. De notre côté, nous essayons de développer le projet de réserver 1000 emplois aux chômeurs âgés, sans aide des organisations patronales.
Il est prévu de généraliser à l’échelle du canton le projet pilote lausannois dans lequel les bénéficiaires du revenu d’insertion sont pris en charge par des équipes mixtes d’assistants sociaux et de conseillers en placement. Quand et à quel prix?
Nous prévoyons la généralisation de ces unités communes pour 2019. Les simplifications dans la délivrance du RI et le plus important retour au travail des bénéficiaires permettent d’envisager un projet auto-financé.
Un autre moyen pour favoriser l’engagement des chômeurs de longue durée?
Il faudrait enfin une modification des règles fédérales sur la prévoyance professionnelle (LPP), afin que les cotisations au 2e pilier soient identiques à tout âge sur le modèle de l’AVS. Mais surtout, il faut une prise de conscience et faire de cette cause une priorité nationale. La généralisation à l’échelle fédérale d’une rente-pont pour chômeurs âgés en fin de droit proches de l’âge de l’AVS et l’obligation faite aux ORP de proposer un job d’insertion pour tout chômeur âgé de 50 ans et plus devraient compléter l’obligation d’annonce de tous les postes vacants aux ORP.
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