Première expérience pratique pour la démocratie par le hasard
élections fédérales
Tirer ses élus au sort, c’est la proposition du collectif Transition citoyenne Vaud pour rajeunir et féminiser l’Assemblée fédérale. Retour en force d’un débat sur les valeurs démocratiques suisses

Convaincu qu’il existe un biais de la représentativité à Berne, le collectif Transition citoyenne Vaud propose de tirer au sort les 19 candidats de sa propre liste pour les élections fédérales. En se basant sur l’examen de l’Assemblée fédérale actuelle, composée à 72% d’hommes et comptant 11 personnes de moins de 35 ans, ses membres estiment que le paysage politique suisse ne fait pas honneur à la population. Ils craignent que les femmes et les jeunes, confrontés à un parlement incapable de trouver des réponses à leurs problèmes, ne désinvestissent le champ politique.
Deux tiers de femmes, un tiers d’hommes
«Nous souhaitons rééquilibrer ce qui se fait au parlement», livre Daniel Curnier, membre du collectif. Pour ce faire, la liste tirée au sort comptera deux tiers de femmes et un tiers d’hommes, tous âgés de moins de 35 ans. Pendant la campagne, les 19 candidats sélectionnés s’uniront sous une bannière commune en dénonçant la surreprésentation de certaines catégories de la population au parlement. En effet, il s’agira de «contrecarrer les logiques d’intérêt personnel, de lobby et de surreprésentation des hommes et des vieux sous la coupole fédérale», explique Clémence Demay, porte-parole du collectif. Elle fait miroiter son espoir qu’un jour l’entièreté de l’Assemblée fédérale soit tirée au sort.
Une méthode antique
Bien qu’il s’agisse d’une première aux élections fédérales, le recours au hasard n’a pas été inventé pour l’occasion. Considérée dès l’Antiquité comme la meilleure stratégie démocratique, la pratique date du temps de la République d’Athènes. A l’époque contemporaine, elle est aussi courante en Suisse comme moyen de lutte contre la corruption et la confiscation du pouvoir.
Plus récemment, les membres d'une liste à l’Assemblée constituante valaisanne ont été déterminés par un algorithme parmi un panel de volontaires. Et dans la sphère judiciaire, l’initiative sur la justice, dont la récolte de signatures court jusqu’au 15 novembre prochain, souhaite que les juges fédéraux s’affranchissent des partis politiques dans leur accès à la magistrature.
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Constat de désillusion
Pour ses partisans, le tirage au sort est une démarche participative qui permet de mettre fin à la séparation entre citoyens et représentants. Et de remettre en cause le système de partis. En effet, il ne permet pas de personnaliser la politique et aucun candidat ne peut miser sur son caractère exceptionnel ou son image pour être élu. Le collectif Transition citoyenne Vaud explique que cela permet «que la question de la réélection ne soit pas un moyen pour les élus de s’assurer une carrière politique». Et cite une récente enquête sur les sommes investies par les parlementaires pour conserver leurs sièges, regrettant que ces dernières puissent atteindre les 200 000 francs.
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«Alea jacta est»
Pour mener à bien son tirage au sort, Transition citoyenne Vaud s’était fixé jusqu’à vendredi pour atteindre le seuil de 190 candidatures. L’appel à candidatures a été diffusé sur les réseaux sociaux et par une large distribution de tracts. Vendredi midi, le collectif, ne recensant que 148 prétendants (66 femmes et 82 hommes), a décidé de reporter le délai au 3 juillet. Les dés sont jetés.