Dans un dossier aussi chaud que celui des hôpitaux, le conseil communal de la Ville de Neuchâtel s’est donné un gros mois pour prendre position. «Pour réfléchir, consulter et sortir de l’émotionnel», commente la nouvelle conseillère communale responsable de la Santé, la Verte Christine Gaillard, entrée en fonction en septembre 2011.

Neuchâtel s’est surtout donné du temps pour mettre des mots sur son rejet sans appel du plan de la ministre socialiste Gisèle Ory, appuyée par la majorité bourgeoise du gouvernement. Plan qui prône l’équilibre entre les hôpitaux de La Chaux-de-Fonds et de Neuchâtel: le département mère-enfant est attribué à Pourtalès à Neuchâtel, toute la chirurgie est centralisée à La Chaux-de-Fonds.

«L’intention est peut-être bonne, relève l’exécutif du chef-lieu, mais elle conduit à l’impasse. Elle ne résiste pas à l’analyse médicale et économique. C’est notre responsabilité de le dire.»

Répartir les soins aigus sur deux sites, dans un canton de 170 000 habitants, conduira «à une surcapacité importante». Avec des investissements considérables de quelque 80 millions. «Excluant de fait la possible concentration des soins aigus à l’horizon 2022, sur un seul site, faute de moyens.»

La Ville de Neuchâtel brise un tabou: «Les soins aigus, qui ne sont qu’une petite partie des soins, ne sont pas une prestation de proximité.» Et d’ajouter qu’elle soutient l’amélioration du service d’urgences de l’hôpital de La Chaux-de-Fonds et le renforcement de sa polyclinique. Elle dit implicitement que la concentration de la chirurgie dans les Montagnes est une hérésie, car il apparaît inconcevable «d’éclater» les soins aigus sur deux sites, «ce qui dévalorisera l’image d’Hôpital neuchâtelois».

Neuchâtel s’insurge encore contre «le manque de prévisions financières sérieuses», estimant que le plan Ory «creusera un gouffre financier qui générera une nouvelle hausse des primes des assurances maladie».

Pour l’exécutif du chef-lieu, le Grand Conseil ne peut pas avaliser le plan Ory. Il doit le renvoyer à l’expéditrice, en exigeant l’étude sérieuse d’un site unique, ainsi que son implantation. Il ne dit pas où localiser cet hôpital, laissant même entendre qu’il pourrait être à La Chaux-de-Fonds. Avant d’émettre des critères qui excluent de fait le Haut: il doit être proche des voies de communication et d’une gare. Or, l’actuel hôpital de La Chaux-de-Fonds est en périphérie de la ville. Tout le contraire de Pourtalès, à un jet de pierre de la gare.

La prise de position courageuse du conseil communal de Neuchâtel brise la chape de plomb qui entoure le projet Ory. Elle risque toutefois de raviver la guéguerre entre le Haut et le Bas. Pour tenter de la désamorcer, Neuchâtel réaffirme son attachement au programme d’agglomération et son soutien au projet de RER et de Transrun (même si elle conteste son financement). Pas sûr que ce soit suffisant pour contenir la colère des Montagnes.